Intervention de Jean-Marc Jancovici

Réunion du mercredi 2 novembre 2022 à 15h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Jean-Marc Jancovici, Professeur à Mines Paris :

Si vous avez bien lu ce que j'ai écrit et écouté ce que j'ai dit, je n'ai jamais affirmé que le nucléaire sauverait le climat. J'ai toujours souligné que le nucléaire n'éviterait pas la décroissance. J'ai toujours dit qu'il ne serait pas à l'échelle pour remplacer les combustibles fossiles. La seule chose que je dis est qu'il fait partie des amortisseurs de la décroissance et, dans cette catégorie, je considère qu'il a un certain nombre d'avantages physiques en raison desquels en faire autant que nous pouvons est une bonne idée, sachant que ce ne sera jamais des montagnes puisqu'il existe des limites temporelles et de compétences sur son déploiement.

J'ai également écrit dans mon premier livre que l'énergie infinie serait une absolue catastrophe. En revanche, j'ai toujours dit qu'il fallait, dans un monde imparfait et qui le sera malheureusement de plus en plus, hiérarchiser nos possibilités d'action et choisir en premier l'option ayant la balance entre avantage et inconvénient la plus intéressante. Or je fais partie des gens qui ne croient pas que, pour des raisons physiques, nous irons jusqu'au bout des scénarios de déploiement des énergies renouvelables diffuses, électriques et intermittentes car ce système est trop complexe, qu'il existe quatre conditions physiques au sujet desquelles l'AIE et RTE indiquent qu'il faudrait parvenir à franchir une barrière et qu'il existe des sujets de stockage (notamment intersaisonnier), d'ajustement en fréquence ou encore de disponibilité.

Je pense que nous n'arriverons pas à aller au bout des scénarios de déploiement des énergies renouvelables diffuses, électriques et intermittentes. Or, en France, nous avons déjà réussi une fois un déploiement du nucléaire. Dans Le monde sans fin, nous utilisons l'image d'un parachute de secours. Cette solution présente des avantages supérieurs à ses inconvénients.

Mon opinion sur le nucléaire date d'une époque où je n'avais pas touché un euro de la part d'un acteur de la filière. Cette opinion date du moment où j'ai commencé à m'intéresser à la question climatique. Chronologiquement, j'ai regardé successivement le climat, le nucléaire et le pétrole. À l'époque, je n'avais aucun lien économique avec le monde de la filière nucléaire. J'ai juste posé de nombreuses questions et, tant que je n'avais pas compris, j'ai continué à poser des questions. C'est de cette époque que date ma conviction que le nucléaire est à mettre du côté des solutions et non du côté des problèmes. Toutefois, ce n'est pas parce que cela fait partie des solutions que c'est miraculeux.

J'insiste sur le fait que le nucléaire n'évitera pas des efforts massifs de sobriété, mais les allégera.

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