Intervention de Nicolas Turquois

Réunion du lundi 11 juillet 2022 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

Cette XVIe législature débute dans un contexte économique très particulier. Notre pays fait face à une inflation galopante qui affecte le pouvoir d'achat, le quotidien de nos compatriotes. Après des décennies d'une hausse des prix quasi nulle, et maîtrisée, la reprise économique post‑pandémie a engendré de fortes tensions d'approvisionnement sur de nombreux produits, puis la guerre en Ukraine a fini de déstabiliser le marché mondial de l'offre et de la demande, notamment des matières premières et de l'énergie. Si des mesures de protection efficace ont immédiatement été prises dès la fin de l'année dernière, notamment sur les prix du gaz et de l'électricité, le pic inflationniste est désormais atteint, et il nous faut agir vite et fort pour en limiter les effets. C'est l'objet du texte qui nous réunit aujourd'hui.

Pour permettre aux Français de gagner plus chaque mois, il contient des mesures qui encouragent le travail sans oublier les plus précaires. À ce titre, la revalorisation de l'ensemble des droits et prestations sociales de 4 % est un signal de justice sociale et d'équité important. Notre groupe se réjouit que les allocations familiales soient revalorisées dès à présent, tout comme les pensions de base de retraite. Toutefois, nous souhaitons interroger le Gouvernement sur l'effet de bord que pourrait constituer une augmentation des taux de CSG frappant certains retraités du fait de cette revalorisation. Il serait en effet contreproductif de reprendre d'une main ce que l'État donne de l'autre.

Le groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) salue également les dispositions de l'article 3, qui simplifient considérablement la mise en œuvre des plans d'intéressement dans les petites et moyennes entreprises. Cette mesure, que notre famille politique porte depuis la dernière législature, doit permettre de mieux partager la valeur produite et de mieux impliquer les salariés dans la réussite des entreprises. Cela s'articule de manière cohérente avec le relèvement des plafonds de la prime de pouvoir d'achat. Sur ce sujet, notre groupe proposera de permettre aux entreprises qui le souhaitent de compléter leurs versements au cours de l'année civile par un nouvel accord, dans la limite des plafonds imposés.

Par ailleurs, les membres de notre groupe, comme la plupart d'entre nous, défendront la déconjugalisation de l'AAH, conformément aux annonces de la Première ministre. Si d'importantes divergences ont été exprimées sur cette question, il s'agit d'une attente forte qui ne peut être occultée. Notre groupe veillera cependant à ce que cette réforme ne fasse aucun perdant.

En outre, nous examinons le projet de loi dans un contexte de crise énergétique d'une ampleur exceptionnelle. Tandis que les dépenses en énergie représentent près de 12 % de la consommation des ménages et ne cessent d'augmenter, la défense de notre sécurité d'approvisionnement énergétique est la priorité, la condition sine qua non préalable à toute autre mesure. Il nous paraît important de rappeler que les dispositions exceptionnelles présentées dans ce texte sont avant tout des réponses à un contexte international subi. Exemple très concret qui animera sans nul doute nos débats : la possibilité de rouvrir une centrale à charbon. Non, nous ne nous réjouissons vraiment pas de ce scénario ; nous le déplorons, même. Cela étant, nous considérons que nous devons nous prémunir contre toute éventualité, notamment celle d'un black‑out en France cet hiver, dont les conséquences humaines et économiques seraient catastrophiques.

Il est de notre responsabilité de prévoir que le cadre légal en vigueur permette à une installation ayant une capacité de production équivalente à deux tiers d'un réacteur nucléaire d'être remise en fonction temporairement et sous condition de compensation carbone, en cas de grave danger sur notre sécurité d'approvisionnement. Sur ce sujet, nous souhaiterions, madame la ministre, que vous réaffirmiez devant nous que cette mesure ne modifie en rien nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre globaux ni notre trajectoire de sortie du charbon. Avez-vous des éléments concrets et chiffrés sur la potentielle réouverture de la centrale à charbon au regard de nos besoins énergétiques ? Enfin, nous considérons que des points de contrôle devront être régulièrement établis pour quantifier et planifier nos objectifs. C'est également pour ces raisons que nous serons favorables aux dispositions relatives à l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique. Le Gouvernement doit pouvoir disposer des outils nécessaires pour éviter au maximum la déstabilisation des marchés de l'énergie.

Dans un contexte économique et politique inédit, il nous appartient à nous, députés de la nation, de trouver les voies et moyens du dialogue et de l'écoute réciproque pour parvenir à l'ambition qui anime, je le crois, chacun d'entre nous. Protéger, améliorer la vie des Français, cela doit se faire dans un climat de sérénité mais aussi de responsabilité budgétaire : nous y serons vigilants.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion