Intervention de Éric Dupond-Moretti

Réunion du mercredi 14 décembre 2022 à 15h00
Délégation aux droits des enfants

Éric Dupond-Moretti, ministre :

C'est cela, la coconstruction ! Nous sommes naturellement en liaison avec l'Arcom pour coordonner leur action – notamment sur le plan technique – et la nôtre, qui passera peut-être par la voie pénale.

Madame Marianne Maximi, j'ai tenu à rencontrer M. François Sauvadet. La protection de l'enfance est une compétence du département et non du ministère de la justice, même si, comme vous, nous sommes préoccupés par la question. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une augmentation de plus de 10 % des moyens alloués à la PJJ et 92 agents supplémentaires. N'oublions pas non plus le rôle de la secrétaire d'État chargée de l'enfance Charlotte Caubel, qui est en permanence en relation avec les départements pour améliorer la situation que vous dénoncez – à juste titre.

La lenteur de la justice est une de mes préoccupations. Chaque fois que les Français sont interrogés à propos de la justice, c'est ce problème qu'ils dénoncent en premier – et ils ont raison. Nous avons donc décidé de réduire les délais. Pour y parvenir, plusieurs leviers peuvent être actionnés.

D'abord, il convient de simplifier les procédures. Je présenterai très prochainement le résultat de nos travaux autour des états généraux de la justice. Si je parle de « nos travaux », c'est parce que beaucoup de gens ont phosphoré. Un comité indépendant a été créé, présidé par Jean-Marc Sauvé et composé de parlementaires – y siégeaient notamment Mme la présidente de l'Assemblée nationale, qui était à l'époque présidente de la commission des lois, et François-Noël Buffet, président de la commission des lois du Sénat –, de magistrats de la Cour de cassation, d'enseignants et d'avocats. Plusieurs groupes de travail, la plupart conduits par de hauts magistrats, se sont ensuite réunis. Je suis allé partout en France, à la rencontre de nos compatriotes. Une plateforme a également été mise en service. De tout cela ont émergé des propositions. En matière civile, en particulier, nous nous dirigeons vers la constitution d'une équipe autour du magistrat, ce qui permet de rendre des décisions plus rapides. Nous avons constaté, grâce aux 2 000 contractuels que j'ai envoyés dans toutes les juridictions – 1 000 au civil et 1 000 auprès des parquets, en matière pénale – qu'il était possible ainsi d'opérer un déstockage important : 25 % d'affaires en moins pour le civil au niveau national. Au-delà du caractère un peu technocratique du terme, ce « déstockage » est en réalité synonyme de dossiers jugés plus rapidement, parce que moins on a de stocks, plus on juge vite.

Ensuite, il faut développer les procédures à l'amiable, inciter les parties à se mettre d'accord. Grâce à cela, la justice sera rendue beaucoup plus rapidement.

Enfin, il faut du personnel supplémentaire. Les lois de finances successives nous ont permis d'embaucher. Les crédits de la mission Justice ont augmenté de 44 % depuis l'élection du Président de la République en 2017 – dont trois fois 8 % depuis que je suis garde des sceaux, ce qui représente 26 % de hausse car, en matière budgétaire, trois fois huit n'ont jamais fait vingt-quatre. Nous avons ainsi embauché des magistrats, des greffiers et des contractuels comme personne avant nous. Quand les effectifs d'une juridiction sont renforcés, la justice est rendue plus rapidement. De ce point de vue, tous les problèmes n'ont pas été réglés, puisque nous envisageons une nouvelle loi de programmation, que j'aurai l'honneur de vous présenter, sans doute en début d'année prochaine. Comme l'a annoncé le Président de la République, nous allons lancer un plan d'embauches massif : 1 500 magistrats, autant de greffiers, des contractuels et du personnel pénitentiaire – car, parallèlement à cela, nous créons des places de prison supplémentaires, de même d'ailleurs que nous ouvrons des CEF.

Monsieur Erwann Balanant, merci d'avoir rappelé quelques points positifs. C'est rare ! Comment faire en sorte que les enfants soient informés de leurs droits ? La PJJ se déplace dans les établissements. Nous envisageons également, avec le ministre de l'éducation nationale, de créer un passeport « éduc'droit », qui permettrait aux enfants de mieux connaître les institutions judiciaires et les règles de droit, ce qui est fondamental à mes yeux. En effet, après sa lenteur, le fait que la justice ne soit pas suffisamment connue est le deuxième grief le plus souvent exprimé par nos compatriotes sur la plateforme que j'évoquais. Soit dit en passant, celle-ci a recueilli 1 million de contributions. C'est un exercice démocratique absolument inédit. Autrefois, quand on voulait réformer la justice, cela se faisait place Vendôme, et uniquement là ; pour notre part, nous avons ouvert largement la consultation. Pour en revenir à l'éducation au droit, notre rapport aux enfants a beaucoup changé : nous les considérons non plus comme des sujets passifs mais comme des citoyens en devenir. À cet égard, l'appréhension de l'importance de la règle de droit – je dirai même, en étant un peu optimiste, de l'État de droit – doit commencer à l'école.

Madame Francesca Pasquini, je ne saurais apporter à vos questions qu'une réponse budgétaire, en regrettant que vous n'ayez pas voté le projet de loi de finances. Quand on dit vouloir renforcer les moyens de la justice, il faut être au rendez-vous du budget. On ne peut pas avoir le beurre, l'argent du beurre et courtiser la crémière ! Mais vous dites non à tout – j'ai parlé hier de « mur des non ». Nous souhaitons renforcer la justice et nous l'avons fait grâce à un budget que vous n'avez pas voté – vous n'êtes d'ailleurs pas la seule.

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