Intervention de Agnès Carel

Séance en hémicycle du mardi 10 janvier 2023 à 21h30
État de l'école de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Carel :

Il nous est proposé de débattre sur l'état de l'école en France. Enseignante en collège depuis trente ans, je n'ai pas attendu ce soir pour mesurer, à la lumière de mon expérience, les aspects positifs de l'enseignement à la française. La joie de transmettre aux générations futures, l'idée d'accomplir une mission importante pour l'avenir des élèves ont toujours été mes moteurs.

Au fil des ans, l'école a réduit la part d'élèves sortant précocement du système scolaire. Aujourd'hui, 79 % des jeunes d'une même tranche d'âge obtiennent leur baccalauréat, l'un des meilleurs scores d'Europe. Parmi les points positifs, on peut citer l'école inclusive : la loi de 2005 a permis qu'à la rentrée 2022, plus de 507 000 élèves soient accueillis dans différents types d'établissements adaptés. Il reste des efforts à faire, notamment pour les accompagner.

Mais depuis des décennies, l'éducation nationale souffre de différents maux. La crise de recrutement des professeurs est à chaque rentrée plus aiguë, entraînant un manque de professeurs titulaires et de remplaçants, donc une perte d'heures d'enseignement. On observe aussi une baisse du niveau, les comparaisons internationales révélant des difficultés bien inquiétantes.

Ces deux principaux constats suscitent un sentiment amer dans la population, qui se traduit par une montée en puissance du secteur privé et par une défiance envers l'éducation nationale. Un sondage Ifop-Fiducial mené à la rentrée 2022 montre que si 77 % des Français sont satisfaits de l'école maternelle et 65 % de l'école primaire, la part de ceux qui sont satisfaits des collèges et des lycées tombe à 41 %.

Il est donc urgent de faire en sorte que la société reconnaisse mieux les enseignants et que ceux-ci soient à nouveau fiers de leur belle mission. Il faut remettre à plat la formation initiale et la formation continue. Beaucoup d'enseignants se sentent insuffisamment préparés à la gestion d'une classe ou à la prise en charge des élèves à besoins éducatifs particuliers, et se trouvent démunis quand il s'agit de faire respecter les principes de la laïcité si chers à notre République.

Redonner plus d'importance au rôle du professeur, c'est restaurer le respect de la fonction. Leurs décisions, concernant les passages de classe par exemple, doivent s'imposer. Il ne s'agit pas de remettre en question la place des parents dans l'école, mais de redonner aux décisions des enseignants une forme d'autorité.

La reconnaissance de la nation passe aussi par une revalorisation des salaires. Des efforts budgétaires ont été consentis, ils portent principalement sur les débuts de carrière. Il faut également prendre en compte la situation des enseignants en milieu et en fin de carrière afin que ceux qui sont désormais des experts puissent continuer de s'épanouir. L'amélioration de la situation des enseignants doit aussi passer par une gestion plus souple des carrières et des affectations, mieux adaptée aux impératifs de la vie d'aujourd'hui.

Pour combattre la baisse du niveau, des mesures ont été déjà prises comme le dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les zones d'éducation prioritaire (ZEP), étendu aux classes de grande section de maternelle depuis la rentrée. Les résultats sont encourageants. D'autres mesures, comme Vacances apprenantes ou les Devoirs faits, sont probantes. Il faut aller plus loin pour éviter les décrochages.

Rapporteure de la mission d'information chargée de dresser un panorama et un bilan de l'éducation prioritaire, je suis particulièrement sensible aux initiatives qui visent à enrayer les inégalités entre les établissements. Une révision de la carte des zones d'éducation prioritaire s'impose. Je crois que vous y travaillez. D'autres mesures sont attendues, je ferai des propositions dans ce sens. Il faut que les élèves aient tous les mêmes chances de réussite.

Les dernières évaluations ont confirmé que le niveau en mathématiques baissait significativement. Monsieur le ministre, vous avez sagement décidé que les mathématiques redeviendraient obligatoires en classe de première générale. Vous venez d'annoncer l'instauration d'une heure hebdomadaire de soutien en mathématiques ou en français pour les élèves de sixième. C'est un premier pas prometteur. Mais est-ce suffisant ? Qu'en est-il des collégiens qui conservent des lacunes après la sixième ?

Les membres du groupe Horizons et apparentés sont particulièrement attachés à l'humanisme républicain qui doit faire de l'éducation un objectif national. L'éducation constitue la mère des batailles, qui commande la capacité d'un pays à innover, à former des citoyens éclairés et à relancer l'ascenseur social. C'est la raison pour laquelle l'éducation nationale doit redevenir une priorité pour le Gouvernement. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour redonner toute leur place à l'éducation nationale et à ses acteurs.

L'école a pour but d'instruire, de former les citoyens de demain – mais des citoyens heureux. Le système éducatif doit valoriser les filières professionnelles, afin que chacun puisse s'orienter vers le métier de son choix.

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