Intervention de Lisa Belluco

Séance en hémicycle du mardi 24 janvier 2023 à 15h00
Discussion après engagement de la procédure accélérée d'un projet de loi adopté par le sénat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLisa Belluco :

Ce projet de loi de transposition du droit communautaire est très disparate et d'une grande technicité, comme habituellement – cela a été souligné à plusieurs reprises. Il n'en aura pas moins des effets concrets sur la vie des Françaises et des Français. Il ne me paraît donc pas correct de l'examiner dans un délai si court.

Le groupe Écologiste – NUPES salue toutefois l'effort de transposition que traduit le texte, d'autant que la France a longtemps compté parmi les mauvais élèves de l'Europe pour ses importantes carences en la matière. Il est vrai que ce retard a été partiellement rattrapé, en particulier à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne, mais nous regrettons que l'adaptation de notre législation au droit communautaire demeure assez minimaliste dans le présent texte. La priorité donnée à la décarbonation des transports, par exemple, aurait pu être plus résolue : le projet de loi se contente du service minimum, sans couvrir les évolutions nécessaires – j'y reviendrai.

Mon groupe salue également les avancées sociales du projet de loi, parmi lesquelles figurent l'élargissement des exigences d'accessibilité pour les personnes en situation de handicap, un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée des parents et des proches aidants, et une coopération renforcée entre les pays européens en matière de services d'aide sociale à l'enfance. Ces transpositions restent toutefois limitées : il n'est pas prévu de mesure structurelle pour renforcer l'accompagnement à la parentalité ou l'accès au numérique, pas plus qu'il n'est prévu de stratégie relative à l'accessibilité – le collectif Handicaps en faisait pourtant la demande et regrette de ne pas avoir été associé aux travaux de transposition.

Si le projet de loi comprend des avancées intéressantes quant aux congés de paternité et de parentalité, il conviendrait d'aller plus loin en apportant un véritable soutien au congé de parentalité, comme en Espagne où il a été porté à seize semaines, est non transférable et rémunéré à 100 %.

En matière de transport, le texte intègre essentiellement la révision de la directive « Eurovignette » – dénomination qui ne correspond plus à la réalité, puisqu'il s'agit non plus d'imposer l'achat de vignettes, mais d'appliquer une taxe kilométrique. Alors que de nombreux pays européens appliquent déjà d'importantes taxes sur les poids lourds – ce qui explique qu'ils aient, bien plus que la France, développé le fret ferroviaire –, nos gouvernements successifs n'ont pas su actionner ce levier pour rééquilibrer la concurrence entre la route et le rail. Le texte affectera pour l'essentiel les péages autoroutiers, exception faite de la future taxe alsacienne sur les poids lourds.

En ce qui concerne le réseau autoroutier, le Gouvernement écarte pour l'instant l'option des redevances facultatives, liées notamment à la congestion, ainsi que le surpéage pour financer des infrastructures de transport. Mon groupe proposera des amendements pour y remédier.

L'article 26 prévoit deux dispositifs permettant de renforcer le principe du pollueur-payeur pour les poids lourds. Si ces mesures sont bienvenues, il est à nouveau regrettable que le Gouvernement n'aille pas assez loin : la modulation et la majoration ne sont applicables qu'aux seuls péages des contrats de concession à venir, et ne concernent pas les contrats en cours. Le Gouvernement choisit donc de différer l'obligation d'intégrer dans les tarifs des péages les coûts environnementaux liés à la pollution. L'argument avancé, selon lequel il faut se garder de bouleverser l'équilibre économique des contrats, ne constitue pas, à notre sens, une justification suffisante. Si ce report est conforme à la directive, il est regrettable au regard de l'urgence climatique, sachant que la plupart des concessions autoroutières arriveront à échéance après 2030. Nous ne saurions attendre une décennie supplémentaire : il est urgent d'activer le report vers le rail et le transport fluvial pour réduire la part du transport routier de marchandises, comme il est urgent de nous concentrer sur l'intermodalité grâce à des plans associant le vélo et le train – dans ce domaine, le texte prévoit de rattraper notre retard sur la moyenne européenne, dont je rappelle qu'elle est comprise entre six et huit emplacements de vélo par train.

Comme d'autres, le groupe Écologiste – NUPES s'opposera à l'article 7. Si nous saluons la volonté d'améliorer la transparence des impôts sur les bénéfices acquittés par les entreprises, nous déplorons que le texte ait laissé primer les intérêts des entreprises : il limite les données à divulguer et rend en partie incohérente cette divulgation pour les sommes dues à l'endroit de pays extérieurs à l'Europe – nos collègues du groupe Les Verts/Alliance libre européenne l'ont révélé.

Enfin, nous nous abstiendrons concernant l'habilitation à légiférer par ordonnance demandée par le Gouvernement pour transposer la directive relative à la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, dite directive CSRD .

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