Intervention de Dominique Maillard

Réunion du jeudi 26 janvier 2023 à 9h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Dominique Maillard :

J'ai l'impression que les réseaux européens sont relativement homogènes en termes d'efficacité. Cette coopération n'est pas nouvelle ; les électriciens européens s'enorgueillissent d'ailleurs de l'antériorité de la communauté des opérateurs à la création du marché commun. Elle n'est, certes, pas totale, car des goulots d'étranglement subsistent, notamment en Espagne.

La France a la chance de jouxter de nombreux pays et bénéficie par conséquent d'interconnexions avec la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la Belgique, la Suisse, l'Italie, l'Espagne et, sans doute bientôt, avec l'Irlande. Nos interconnexions sont denses et offrent, en plus de l'avantage de la sécurité mutuelle, un avantage économique.

Si nous nous privions de ces échanges avec l'étranger et si nous souhaitions éviter de connaître des pannes, il faudrait dès lors être dotés d'une surcapacité considérable sur notre territoire pour faire face aux pointes, sachant que les installations déployées à cet effet ne seraient vraisemblablement sollicitées que quelques heures sur l'année, car les pointes sont fortement conjoncturelles.

Les interconnexions physiques peuvent encore être renforcées, et constituent une aubaine qui nous permet de nous secourir mutuellement et de profiter des disponibilités qui peuvent exister dans des pays voisins. L'électricité s'échange de proche en proche. Lorsque nous importons de l'électricité de l'Allemagne, il se peut qu'au même moment, l'Allemagne en importe de Pologne. L'existence de ces interconnexions conduit l'Europe à représenter un ensemble d'environ 400 000 mégawatts. Or, la plus haute puissance de pointe jamais appelée sur le réseau français, en 2012, s'élève à 102 000 mégawatts.

Ce réseau nous permet d'amortir les à-coups. La perte de 1 000 mégawatts sur un petit réseau, comme la Belgique, engendrerait certainement un black-out si le pays concerné était totalement isolé. Sur un réseau comme le réseau français, la perte de 1 000 mégawatts est absorbable, tandis qu'elle est imperceptible sur un réseau de 400 000 mégawatts.

Ces interconnexions physiques constituent un secours permanent et mutuel. Elles ne doivent en aucun cas être abandonnées et devraient même être renforcées. En France, elles sont difficiles à opérer d'un point de vue environnemental, puisqu'il faut traverser les Pyrénées, les Alpes ou le Rhin. Les lignes aériennes supposent de vaincre des oppositions très importantes. Les ouvrages souterrains sont possibles, mais sensiblement plus onéreux. La liaison France-Espagne a par exemple coûté environ 800 millions d'euros, là où une ligne aérienne n'en aurait coûté qu'une centaine.

En somme, j'estime que les avantages des interconnexions dépassent les inconvénients.

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