Intervention de Thomas Gomart

Réunion du jeudi 19 janvier 2023 à 15h00
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères – États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées – visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des dirigeants ou des partis politiques français

Thomas Gomart, directeur de l'Institut français des relations internationales (IFRI) :

Le quatrième volet de la fonction de contrôle était la production de normes par les agences onusiennes. On constate un fort investissement chinois dans le contrôle de ces agences. Le terrain était libre du fait du retrait ou du désintérêt des Américains pour ces instances, ainsi que du sous-investissement de diplomaties comme les nôtres qui manquent de moyens pour y être davantage présentes.

Permettez-moi de compléter mes propos concernant les sanctions. Un très bon livre de Juan Zarate raconte l'histoire de l'Office of Foreign Assets Control (Ofac), une instance que tout le monde connaît aujourd'hui mais qui était encore quasiment confidentielle au début des années 1980. En 2001, la réponse américaine aux attentats du 11 septembre a été de contrôler les flux financiers des groupes terroristes ; ce faisant, les autorités ont récupéré énormément d'informations qui leur servent à autre chose. Au fur et à mesure, les sanctions se sont donc sophistiquées. Du reste, les États-Unis ne sont plus les seuls à prendre des sanctions : la Chine, la Russie, le Japon ou encore l'Europe en prononcent également. Il faut alors voir comment ces sanctions se combinent entre alliés. Pour nous, Européens, la grande différence entre les États-Unis, la Chine et la Russie, c'est que nous sommes les alliés des premiers.

À mon sens, l'attitude des États-Unis vis-à-vis des Européens s'explique très largement par le fait que nous avons désarmé depuis le début des années 1970, c'est-à-dire depuis deux générations, tandis que les autres acteurs stratégiques mondiaux réarment depuis 2001, c'est-à-dire depuis une génération. Aussi la quasi-totalité des pays européens pensent-ils leur sécurité dans le cadre otanien. À ce titre, notre pays fait figure d'exception. Seuls trois États membres de l'Alliance atlantique sont capables de concevoir leur politique de défense en dehors de l'Otan : les États-Unis, bien sûr, la Turquie et la France. Les autres pays européens considèrent que leur sécurité est assurée par les Américains. Nous sommes d'ailleurs dans un moment de resserrement de la relation transatlantique, notamment du fait des enjeux énergétiques que j'ai évoqués en répondant à M. Dumont.

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