Intervention de Dominique Voynet

Réunion du mardi 7 février 2023 à 20h30
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Dominique Voynet, ancienne ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement :

Je ne devrais pas vous répondre, ce n'est pas l'objet de votre commission d'enquête. Je vous ai dit aussi que je n'avais plus de responsabilités nationales sur le plan politique : je n'ai donc que mon avis de citoyenne sur la question.

L'idée n'est pas d'empêcher. On n'a jamais prôné un mode de fonctionnement antidémocratique, qui nierait l'action du Parlement, par exemple. Dans de nombreuses situations, les écologistes ont plaidé pour obtenir des débats citoyens ou parlementaires sur les sujets énergétiques. M. Lionel Jospin vous l'a dit, je défends mes convictions partout où je vais. Je ne suis pas venue avec mon drapeau dans ma poche. Cela ne me rend ni irrationnelle, ni stupide, ni incapable d'écouter les arguments des autres.

Je vous renvoie la question : quelle part de la richesse nationale entend-on consacrer à notre stratégie énergétique ? Personne ne sait combien coûteraient de nouveaux EPR, tel que celui de Flamanville. On nous dit qu'il faudrait 2 milliards d'euros pour raccorder l'EPR de Penly au réseau. L'usine Melox connaîtrait de graves difficultés : les tonnages de MOX produits baisseraient tellement qu'on ne l'utiliserait pas dans toutes les centrales autorisées. On pense y construire une nouvelle usine – l'IRSN et Orano l'ont confirmé dans le débat sur l'EPR2 de Penly.

On nous dit qu'on a besoin d'un atelier français de conversion d'uranium de retraitement, pour ne plus dépendre de l'usine de Seversk, aux pollutions désastreuses. Et la nouvelle piscine de refroidissement à La Hague, et Cigéo, et Iter… comment fait-on pour assurer simultanément le grand carénage ; la construction de nouveaux réacteurs et des usines ; le démantèlement des centrales de production et des réacteurs de recherche déjà arrêtés ; la montée en puissance des renouvelables, qui sont indispensables dans tous les scénarios, pour compléter ; et les investissements incontournables si l'on ne veut pas dégrader notre situation dans le champ de l'habitat, des transports, de l'agriculture, du tertiaire, pour réduire notre dépendance aux fossiles ?

C'est tout cela qu'il faut faire. Comme toute bonne ménagère de plus de 50 ans, je me dis qu'un euro, on ne le dépense qu'une fois. On va dépenser pour démanteler, mais qu'a-t-on démantelé jusqu'à maintenant ? Ni Brennilis, ni Saint-Laurent-des-Eaux. À Chooz, on a dix ans de retard sur le programme initialement prévu. Des neuf réacteurs de la filière uranium naturel-graphite gaz, pas un n'est démantelé. Certaines centrales sont arrêtées depuis trente ans, sans être démantelées. Cela va coûter des dizaines de milliards !

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