Intervention de Karine Herviou

Réunion du jeudi 16 février 2023 à 15h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Karine Herviou, directrice générale adjointe en charge de la sûreté nucléaire :

Si ma mémoire est bonne, une fissure résultant d'un phénomène de corrosion a été détectée sur la tuyauterie du réacteur n° 1 de la centrale de Civaux lors de la visite décennale. Ces visites permettent de vérifier l'absence des modes d'endommagement qui ont été identifiés lors de la conception. En l'occurrence, le mode d'endommagement qu'EDF cherchait à détecter était la fatigue thermique, susceptible de provoquer des fissures. Les personnes qui ont réalisé les contrôles par ultrasons – c'est le même principe que pour une échographie – ont eu des doutes. EDF a décidé d'enquêter davantage sur ce défaut, et la soudure en question a été coupée et envoyée au laboratoire d'EDF, à Chinon. C'est là que le phénomène de corrosion sous contrainte a été identifié à la fin de 2021.

EDF a décidé très rapidement d'arrêter le réacteur n° 2 de la centrale de Civaux, puis un peu plus tard les deux réacteurs de la centrale de Chooz. Il y a quatre réacteurs de cette génération en France – des réacteurs de type N4 de 1 450 mégawatts électrique (MWe). Il se trouve que la visite décennale des deux réacteurs de la centrale de Chooz avait déjà été réalisée. En interrogeant les personnes qui s'en étaient chargées, EDF a eu un doute et s'est inquiété d'une présence éventuelle du même phénomène qu'à Civaux. L'exploitant a donc décidé de lui-même d'arrêter ses quatre réacteurs N4.

Dans le même temps, la troisième visite décennale du réacteur n° 1 de Penly était en cours. Et l'opérateur y a également détecté des défauts. Le laboratoire a par la suite confirmé qu'il s'agissait de corrosion sous contrainte, à la toute fin de 2021. Cela laissait craindre que les autres réacteurs pouvaient également être affectés.

EDF a déclaré ce que l'on appelle des événements significatifs et a essayé de caractériser le phénomène. L'ASN a demandé à EDF de définir une stratégie de contrôle de l'ensemble des réacteurs.

La direction des équipements sous pression nucléaires de l'ASN réalise des expertises liées à la réglementation de ces équipements. Nous avons l'habitude de travailler ensemble, lorsque cette direction saisit l'IRSN pour qu'il se penche sur les enjeux de sûreté associés à la réglementation.

Cette direction nous a saisis de certains points particuliers, notamment sur les enjeux de sûreté liés au phénomène de corrosion sous contrainte affectant un système de sauvegarde qui est essentiel pour la sûreté du réacteur. L'IRSN a été interrogé sur les mesures compensatoires qu'EDF pouvait mettre en place avant que l'ensemble des réacteurs soient contrôlés. Nous avons été interrogés sur les conséquences en cas de brèche et sur le risque éventuel d'un accident grave. La direction des équipements sous pression nucléaires a pour sa part examiné les stratégies de contrôle.

Un retour d'expérience a été organisé au fur et à mesure de la réalisation des contrôles. EDF a développé un dispositif de mesure un peu plus fin, car l'inspection par ultrasons utilisée précédemment ne permettait pas de mesurer la profondeur du défaut. Le développement de ce programme a permis à EDF d'éviter de couper systématiquement les soudures pour lesquelles l'exploitant considérait qu'il y avait un défaut. Un premier dispositif a été mis au point à l'été et les contrôles se sont poursuivis avec ce système.

Tous les sujets sont examinés : les stratégies de contrôle, l'analyse des défauts et celle de leurs causes. EDF a émis un certain nombre d'hypothèses sur les raisons de l'ampleur des phénomènes de corrosion sous contrainte observés au sein du parc. L'IRSN a étudié ces hypothèses et a identifié un certain nombre d'autres causes possibles. À ce jour, la question n'est pas tranchée.

L'exploitant remet des dossiers. L'ASN nous saisit d'une partie de ceux-ci et réalise également une expertise par ses propres moyens, grâce à la direction des équipements sous pression nucléaires. Mais nous travaillons vraiment la main dans la main sur ce sujet.

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