Intervention de François de Rugy

Réunion du mercredi 8 mars 2023 à 20h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

François de Rugy, ancien président de l'Assemblée nationale, ancien ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

Certains veulent faire croire que les politiques sont des incompétents qui prennent des décisions sans avoir consulté personne. Cela ne correspond pas à la réalité. C'est assez énervant. Vous êtes des députés. Ne laissez pas dire que vous prenez des décisions dans des émissions de télé-réalité ou sur des tweets. Vous prenez des décisions parce que vous avez travaillé sur des sujets.

En tant que ministre, j'ai consacré énormément de temps au sujet. Évidemment, cela ne se voit pas. Je n'allais pas me mettre en scène chaque fois que je menais une réunion de travail ou que j'avais un échange avec M. Lévy, le président d'EDF ou le Haut commissariat du CEA.

Nous avons longuement discuté d'un certain nombre de scénarios sur la consommation. Ce qui commande est la question : quel est le niveau de consommation de l'électricité – ce qui est difficile à définir – consommation française, européenne, et quelle peut être la production que l'on met en face pour ne pas être en situation de surproduction ou de sous-production ? Sachant que l'on ne dispose pas de beaucoup de capacités de stockage, même si les barrages hydroélectriques peuvent parfois servir de tampons.

Nous avions des schémas. Nous avons travaillé avec des polytechniciens – je ne sais pas si pour M. Bréchet, les polytechniciens sont des zozos, mais je ne le considère pas – avec des personnes du ministère de l'économie et des finances, avec des personnes d'EDF pour ce qui concernait le parc nucléaire, sur la façon dont on pourrait faire de la programmation, de la planification sur les moyens de production nucléaire.

On parle peu des autres. Je me suis battu, dans la PPE, pour augmenter les perspectives de production d'éoliens en mer. Aujourd'hui, tout le monde semble d'accord, mais à l'époque, c'étaient des bras de fer. Certaines régions ont également poussé dans ce sens. Je me suis battu sur le biogaz. Au vu des difficultés que l'on a aujourd'hui sur l'approvisionnement en gaz, il aurait été bon d'intensifier plus vite et plus tôt sur ces questions. Cela a été le cas sur la sobriété, sur la chaleur renouvelable.

Avec tous ces sujets, on essaie d'établir des scénarios, avec la perspective d'une substitution progressive des réacteurs nucléaires de plus de 40 ans – conçus pour 40 ans, qui, s'ils devaient être prolongés, devaient faire l'objet de nouveaux investissements – par de nouveaux réacteurs de type EPR. Ceci également avec des perspectives de consommation qui avaient vocation à augmenter.

En 2018-2019, nous n'étions pas du tout dans les mêmes perspectives qu'aujourd'hui sur l'électrification des transports, notamment de la voiture. À l'époque, je suis allé sur les ronds-points, j'ai discuté avec des gilets jaunes, dans les médias, dans l'ensemble des réseaux dont ils disposaient. Ils avaient pour « tête de Turc » la voiture électrique. Nous avions des débats à l'Assemblée nationale, ainsi qu'au niveau européen. « Cela ne fonctionnera pas. Il ne faut pas faire de batterie, cela ne sert plus à rien. Peut-être faut-il aller sur l'hydrogène, mais on verra un autre jour. Les moteurs thermiques vont continuer à être améliorés. Pourquoi financer des programmes de recherche sur l'hydrogène ? ». Mon prédécesseur était un militant de l'hydrogène. Il n'a pas du tout été suivi au sein du gouvernement sur ce point.

Entretemps, d'autres décisions ont été prises, au niveau français comme au niveau européen, de développer l'utilisation de l'électricité pour décarboner l'économie. Cela nécessite des moyens de production supplémentaires qui n'étaient pas forcément envisagés il y a cinq ans.

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