Intervention de Raphaël Schellenberger

Réunion du jeudi 16 mars 2023 à 14h00
Commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRaphaël Schellenberger, président :

Après 150 heures d'auditions, après avoir entendu 88 personnes et reçu plus de 5 000 pages de contributions écrites, notre commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France effectue aujourd'hui sa dernière audition. Nous avons le privilège de vous accueillir, monsieur le Président de la République, pour clore ce cycle, après avoir reçu votre prédécesseur ce matin. Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation et de vous entretenir avec les députés sur les orientations de la politique énergétique définies au cours de votre mandat.

Nous saluons votre présence : entendre deux anciens présidents de la République constitue, en effet, un précédent dans la procédure des commissions d'enquête, en tout cas au cours de la Vème République. Votre démarche témoigne de votre attachement à l'institution parlementaire, de l'importance que vous accordez à la situation énergétique de la France, dont les implications sont à la fois sociales, économiques et géostratégiques, et de votre reconnaissance de la légitimité du Parlement à intervenir dans le domaine de la politique énergétique, notamment dans le cadre de ses activités d'évaluation et de contrôle.

Vous avez été Président de la République de 2012 à 2017. Vous avez incité au renforcement des compétences et de l'information du Parlement dans le domaine de l'énergie : vous avez développé de nouveaux outils de programmation, issus notamment de la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, instauré la stratégie nationale bas-carbone et la programmation pluriannuelle de l'énergie. Vous avez veillé à l'affermissement de la démocratie participative, par une ordonnance de 2016, ratifiée en 2018. Faute de temps, nous n'avons pas exploré cette dernière problématique, le spectre de nos travaux étant déjà très large.

Nous avons auditionné plusieurs membres des gouvernements constitués lors de votre mandat présidentiel, dont les anciens ministres M. Manuel Valls, Mme Delphine Batho, M. Arnaud Montebourg et Mme Ségolène Royal, ainsi que plusieurs chefs d'entreprise ou responsables d'organismes nommés au cours de cette période – MM. Jean-Bernard Lévy, Philippe Knoche, Bernard Fontana, Jean-Christophe Niel, Pierre-Marie Abadie, Daniel Verwaerde, Yves Bréchet, François Brottes.

Parmi les mesures relevant de la politique énergétique durant votre mandat, la loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a particulièrement retenu notre attention. Sur les 215 articles qu'elle comporte, deux dispositions ont fait l'objet de divers commentaires : la réduction de la part du nucléaire dans le mix électrique, à 50 % à l'horizon 2025, ainsi que le plafonnement de la puissance nucléaire installée à 63,2 gigawatts. D'autres actions mises en œuvre au cours de votre mandat ont également été évoquées : la COP21, les mécanismes de capacité et d'effacement, le déploiement des compteurs intelligents, le Fonds chaleur, le financement de la transition énergétique, ou encore le barrage de Sivens. L'accord électoral passé avec les Verts a lui aussi donné lieu à discussion.

Nous savons cependant, monsieur le Président, que les responsabilités qui incombent à un chef d'État – les vôtres ont été particulièrement lourdes, notamment en raison des attentats, de la gestion de la dette grecque, des interventions militaires extérieures, du Brexit – ne sauraient s'encombrer de batailles de chiffres, dont la portée normative est discutable. Il semblerait néanmoins que les annonces de réduction ou de fermeture aient contribué à démobiliser une filière entière.

Nous avons exclu le domaine militaire de notre champ d'investigation, mais les auditions ont clairement mis en évidence que l'énergie est utilisée comme une arme, ou conçue comme un moyen d'hégémonie par divers États. Trois d'entre eux ont fait l'objet d'observations au cours de nos travaux : la Chine, l'Allemagne, la Russie. C'est pourquoi il nous a semblé nécessaire d'entendre votre point de vue.

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