Intervention de Sacha Houlié

Séance en hémicycle du lundi 27 mars 2023 à 16h00
Faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSacha Houlié, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Cent ans : c'est l'âge du permis de conduire qui, après tout ce temps, reste toujours aussi précieux pour ceux qui l'obtiennent, qui le détiennent et – osons le dire – qui le conservent. Le permis de conduire est un sésame vers l'autonomie : malgré tous les dispositifs qui ont été déployés pour promouvoir les transports en commun – le bus, le train, les trains de nuit –, malgré les plans Vélo successifs, il reste pour beaucoup de jeunes des zones rurales, dont j'ai fait partie, un gage d'émancipation, qui permet de se rendre au travail, d'avoir des loisirs, de voir ses amis, bref : d'avoir tout simplement une vie sociale.

Mais le permis de conduire représente aussi un obstacle pour tous ceux qui, ne l'obtenant pas, ne peuvent accéder à ces activités et à ces loisirs. À l'heure actuelle, 20 % des Français en âge de travailler, soit 7 millions de personnes, se heurtent à cette difficulté, et 28 % des Français en insertion professionnelle disent même avoir refusé une formation ou un emploi parce qu'ils n'avaient pas les moyens de se déplacer.

Le permis est aussi un obstacle en ce qu'il faut du temps pour l'obtenir. Je ne fais pas référence ici au délai nécessaire avant de tenter l'examen une première fois, mais à celui qui s'écoule entre le premier et le deuxième passage. Ce délai, qui atteignait soixante-cinq jours en 2014, avant la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi Macron, et avait été ramené à quarante-deux jours en 2018, est malheureusement reparti à la hausse après la crise liée au covid, si bien que cinquante-trois jours sont désormais nécessaires entre un examen raté et une nouvelle tentative.

Par ailleurs, le permis de conduire coûte cher. En 2005, lorsque le dispositif du permis à 1 euro par jour a été créé, on considérait que le permis revenait en moyenne à 1 200 euros. D'après le sondage que j'ai effectué auprès des auto-écoles de la Vienne, avec lesquelles la proposition de loi a été construite – j'en profite d'ailleurs pour saluer madame Aurore Ferrand Rousseau, coauteure du texte –, le permis de conduire coûte entre 2 000 et 3 000 euros, ce qui représente un budget non négligeable. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu rendre l'obtention du permis de conduire plus rapide, plus simple et moins chère. Pour ce faire, nous formulons trois propositions.

La première consiste à tirer toutes les conséquences du plan « 1 jeune, 1 solution », qui a été très bien accueilli et a fonctionné remarquablement. Pourquoi ne pas créer une plateforme « 1 jeune, 1 permis », qui permettrait à chacun de connaître en quelques clics toutes les aides disponibles – aides de l'État, des établissements publics et des collectivités –, en renseignant simplement son code postal ? C'est la disposition proposée à l'article 1er . Cette plateforme aurait par ailleurs vocation à être coordonnée avec celle qui recense les auto-écoles labellisées, avec les différents sites déjà mis à disposition par le ministère de l'intérieur et des outre-mer, et avec le système RdvPermis, généralisé depuis le 1er mars, qui permet désormais de prendre rendez-vous pour passer le permis de conduire.

La deuxième disposition concerne le compte personnel de formation (CPF), qui rencontre lui aussi un succès remarquable : le permis de conduire représente ainsi le plus gros volume d'achats effectués sur la plateforme MonCompteFormation, avec 320 000 formations par an, soit 28 % des permis délivrés en 2021. Ce système ayant fait ses preuves, nous estimons qu'il pourrait être étendu à d'autres permis, notamment au permis de catégorie A2, dit « gros cube », pour ceux qui se déplacent en milieu urbain ; aux permis permettant de conduire une voiturette ou une petite moto, pour les plus jeunes ; voire aux permis permettant de tirer une remorque, pour les artisans. Le Gouvernement pourrait même aller plus loin en synchronisant les financements perçus grâce au CPF avec l'aide de 500 euros destinée aux apprentis. Il reprendrait ainsi à son compte une mesure que nous avions proposée mais qui a été déclarée irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution – dont le respect a été assuré avec une parfaite rigueur pour ce texte, ce que je tiens à saluer.

Dernière proposition, et non des moindres : comme je l'ai indiqué, les délais nécessaires au passage du permis de conduire constituent un obstacle. Les inspecteurs du permis de conduire, qui sont déjà 1 280 en France, seront plus nombreux encore après l'entrée en vigueur du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), qui prévoit le recrutement de cent inspecteurs supplémentaires en quatre ans. Le nombre d'examinateurs a également augmenté grâce à la convention passée avec La Poste après l'adoption de la loi Macron. Toutefois, ils pourraient être plus nombreux encore si nous adoptions l'article 3, qui prévoit de permettre le recrutement de nouveaux examinateurs ou inspecteurs du permis de conduire – formés respectivement pendant deux mois et six mois – parmi les agents publics contractuels ou titulaires de la fonction publique d'État ou de la fonction publique territoriale. Ces derniers renforceraient ainsi la cohorte des inspecteurs du permis de conduire, ce qui permettrait de proposer davantage de créneaux d'examen, donc de réduire d'autant le délai d'attente pour obtenir le permis de conduire.

Un permis de conduire plus simple, plus rapide et moins cher : tel est l'objectif de cette proposition de loi, que vous serez amenés à enrichir, puisque certaines de vos propositions ont vocation à y être intégrées, mais que vous serez surtout amenés à voter pour qu'elle bénéficie aux jeunes de ce pays. En pratique, en effet, 80 % des lauréats du permis de conduire ont moins de 25 ans et 86 % considèrent le permis comme l'une des clés de leur entrée dans la vie active. C'est dire à quel point les jeunes nous attendent sur cette question. Je vous demande donc de rééditer l'exploit que nous avons réussi en commission en adoptant cette proposition de loi à l'unanimité.

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