Intervention de Éric Béranger

Réunion du mercredi 3 mai 2023 à 11h10
Commission de la défense nationale et des forces armées

Éric Béranger, président-directeur général de MBDA :

Je suis ravi de pouvoir m'exprimer devant vous sur ce sujet extrêmement important. Je crois que nous vivons une époque charnière et même un moment charnière. D'un côté, le contexte sécuritaire international – et notamment la guerre en Ukraine – révèle l'importance de la résilience, de pouvoir tenir dans la durée, et donc l'importance des stocks et des capacités de production. De l'autre, l'accélération des ruptures technologiques nous impose d'être innovants en permanence et de ne jamais relâcher l'effort de préparation de l'avenir si nous voulons maintenir notre posture stratégique et continuer à compter sur la scène internationale dans cinq ou dix ans.

MBDA est un outil de souveraineté par excellence. Il s'agit du premier acteur européen dans les systèmes de missiles. C'est également un outil de coopération, et c'est d'ailleurs grâce à la coopération que MBDA existe et peut fournir aux forces les moyens de leur supériorité opérationnelle. Dans ce contexte, MBDA doit prendre des décisions en termes de choix d'investissement, en termes de recrutement, dont les répercussions peuvent être très significatives sur notre posture stratégique dans les cinq à dix ans à venir. D'où l'importance d'une LPM, de la visibilité qu'elle peut offrir et de la clarification des choix de la France pour nous guider dans ces investissements et dans les décisions que nous devons prendre aujourd'hui.

Dans cette enveloppe globale de 413 milliards d'euros, l'on peut constater une augmentation très significative du montant consacré aux munitions, puisque le rapport annexe mentionne le chiffre de 16 milliards d'euros, avec des précisions sur certains éléments : futur missile antinavire/futur missile de croisière (FMAN/FMC) ; Aster ; missile d'interception, de combat et d'autodéfense (Mica) ; Meteor ; missile moyenne portée (MMP), désormais appelé Akeron moyenne portée (Akeron MP). L'on observe aussi que le nucléaire et la défense sol-air, avec 5 milliards d'euros, apparaissent également comme des priorités très claires. Il s'agit bien d'un investissement significatif de la France dans ses capacités cruciales.

Nous percevons par ailleurs un enjeu très fort en termes de résilience de la production, qui a fait l'objet de nombreux groupes de travail. Contrairement à la précédente loi, la nouvelle LPM ne détaille pas l'agrégat équipement par année. Ces éléments seront néanmoins clarifiés au fil des discussions, sachant que cette clarification et cette visibilité que nous sommes en train de créer ensemble vont de l'intérêt de tous : plus nous gagnons en visibilité, plus nous augmentons notre capacité, en tant qu'industriels, à anticiper en termes de stock et d'outils industriels. Par le passé, et encore plus récemment, MBDA s'est montré très actif dans cette anticipation. Sur les cinq dernières années, nous avons investi 300 millions d'euros dans notre outil industriel, au titre de l'anticipation. Nous prévoyons de porter ce montant à 500 millions d'euros sur les cinq prochaines années. En fin d'année dernière, nous avons augmenté notre capacité à constituer des stocks – en équipements, en pièces détachées – de 200 millions d'euros supplémentaires.

Nous sommes capables d'agir en ce sens grâce à la masse critique de MBDA, qui nous provient de la coopération entre les différents États, principalement avec le Royaume-Uni et l'Italie, qui constitue l'épine dorsale de MBDA. Nous sommes aussi capables d'agir en ce sens grâce aux exportations.

En conclusion, j'insisterai sur deux points. D'abord, la guerre en Ukraine met en exergue plusieurs axes significatifs, en particulier l'axe de la résilience, l'axe de la défense sol-air (qui est bien documenté) et l'axe de la frappe dans la profondeur, sur lequel nous allons continuer à travailler chez MBDA– notamment avec le programme FMAN/FMC (futur missile antinavire/futur missile de croisière. Nous avons pu observer la quantité de missiles que les Russes ont envoyés en Ukraine, ainsi que les évolutions en cours dans le domaine de l'hypersonique. Au niveau mondial, c'est aujourd'hui le premier axe de développement des États-Unis. De même, un pays comme le Japon – dont le budget militaire est à peu près équivalent à celui de la France – va consacrer, en 2023, 6 milliards de dollars aux investissements sur la frappe dans la profondeur. De fait, pour maintenir notre posture stratégique, la France a tout à fait raison d'investir sur cet axe de la frappe dans la profondeur. Ensuite, je suppose que nous profiterons du temps de questions-réponses pour revenir sur les axes d'innovation – laser, hypersonique, intelligence artificielle, combat collaboratif – que vous souhaiterez aborder.

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