Intervention de Philippe Brun

Séance en hémicycle du mardi 6 juin 2023 à 15h00
Approbation des comptes de la sécurité sociale pour l'année 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Brun :

Nous avons, pour la première fois dans cet hémicycle, une discussion sur l'approbation des comptes de la sécurité sociale, après avoir formellement désapprouvé pour la deuxième fois les comptes de la nation que le Gouvernement nous présentait pour l'année 2021, ainsi que ceux de 2022. Le groupe Socialistes et apparentés se réjouit tout d'abord d'avoir l'occasion de discuter ici de l'approbation des comptes de la sécurité sociale. Il se réjouit également que le législateur organique ait décidé de subordonner la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale à l'approbation formelle des comptes de celle-ci : la discussion que nous avons aujourd'hui n'est donc pas une discussion anodine. Vous nous demandez, monsieur le ministre de la santé et de la prévention, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, d'approuver vos comptes. Nous avons bien compris la disjonction que vous opérez entre le jugement politique que nous portons sur votre budget et celui que nous portons sur votre gestion. Vous me permettrez donc de concentrer mon propos non sur votre politique mais sur votre gestion.

Le rapport de la Cour des comptes annexé au présent projet de loi est éloquent. Il l'est d'abord sur la réforme des retraites, celle au sujet de laquelle vous ne souhaitez pas que le Parlement puisse se prononcer. Nous apprenons ainsi que, d'ici à 2030, le déficit sera toujours important – à hauteur de 5,7 milliards d'euros –, en dépit des mesures que vous avez décidées. Nous apprenons également que, loin de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes, votre réforme se traduira par un différentiel de 40 % entre les pensions de droit commun des femmes et celles des hommes. Nous y apprenons également que la réforme des retraites aura un coût de plus de 400 millions en 2023, sa première année d'application.

S'agissant de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, nous constatons une fois de plus qu'il dépasse de 10 milliards l'objectif qui avait été voté. Des efforts importants sont à faire dans ce domaine, en ciblant par exemple la politique du médicament dont la Cour des comptes estime qu'elle pourrait nous rapporter entre 12 et 18 milliards d'euros. Nous constatons également dans nos territoires à quel point la politique de tarification à l'activité – intrinsèquement liée à celle de l'Ondam – crée de la désespérance, rompt la confiance et provoque des difficultés sanitaires importantes. C'est en tant que député de l'Eure, premier désert médical de France métropolitaine, que je vous le dis.

S'agissant de votre gestion générale et de celle des différentes branches de la sécurité sociale, nous constatons clairement les erreurs qui ont été commises : 15 % des dossiers de la branche vieillesse et 10 % de ceux de la branche maladie sont aujourd'hui erronés. Les erreurs sont tellement importantes – à hauteur de 8 milliards de versements indus – dans la branche famille que la Cour des comptes a décidé de ne pas certifier les comptes de celle-ci, ce qui est historique. Vous le savez, monsieur le ministre délégué : ce montant est bien supérieur aux bénéfices attendus du plan de lutte contre la fraude que vous avez récemment présenté. Nous, députés, ne pouvons que constater dans nos circonscriptions les situations de désespoir auxquels ces indus peuvent conduire : des milliers de Français reçoivent des rappels de leur caisse d'allocations familiales et doivent rembourser sous trois mois des dettes importantes de 4 500 ou 5 000 euros. Ils s'en étonnent souvent auprès de leur député, rappelant qu'ils ont fait toutes les déclarations nécessaires et ne sont pas des fraudeurs. Il y a donc un sérieux effort à faire, messieurs les membres du Gouvernement, pour lutter contre ces indus qui constituent à la fois un manque à gagner pour nos régimes de sécurité sociale et un motif de désespérance sociale.

Nous comprenons bien que vous nous demandez aujourd'hui notre confiance – une confiance que vous vous acharnez à détruire entre l'exécutif et le Parlement.

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