Intervention de Michel Lauzzana

Réunion du mercredi 31 mai 2023 à 9h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Lauzzana, rapporteur pour avis :

Nous nous retrouvons pour un nouveau rendez-vous autour de l'exécution des finances sociales. Si le budget de l'État est depuis bien longtemps approuvé dans un véhicule juridique distinct, la loi de règlement, à la suite d'un examen par notre commission dans un cadre spécifique, ce n'était pas le cas jusqu'à cette année pour les comptes sociaux.

Nous examinions en effet les recettes et les dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (ROBSS) et de leurs satellites au titre de l'année précédente dans le cadre de la première partie du PLFSS. Or, il faut bien le reconnaître, cette étape de constat et d'approbation faisait souvent l'objet d'un examen rapide et était concurrencée par les parties suivantes du PLFSS, qui portent quant à elles des mesures pour l'année en cours et celle à venir.

Afin d'accorder à l'analyse et à l'approbation des comptes de la sécurité sociale l'attention qu'elles méritent, la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, défendue par notre ancien collègue Thomas Mesnier, a introduit une nouvelle catégorie de loi de financement, les lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale (LACSS).

Je vous présenterai tout d'abord les principaux constats relatifs au solde, à la dette et aux recettes pour 2022, puis j'en viendrai aux dépenses.

Concernant le champ des administrations de sécurité sociale (ASSO), plus large que celui des régimes sur lesquels je concentrerai mon propos par la suite, nous constatons en 2022 un excédent de 0,3 % du produit intérieur brut (PIB), soit 9,2 milliards d'euros. S'agissant des régimes de base, le déficit pour 2022 s'élève à 21 milliards d'euros. Il résulte d'un déficit de 21 milliards d'euros pour la branche maladie et de 3,8 milliards d'euros pour la branche vieillesse, compensés par un excédent de 1,7 milliard d'euros pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), de 1,9 milliard d'euros pour la branche famille et de 0,2 milliard d'euros pour la branche autonomie, qui termine son deuxième exercice.

Si l'on y ajoute l'excédent de 1,3 milliard d'euros qu'affiche le fonds de solidarité vieillesse (FSV), nous obtenons un déficit de 19,6 milliards d'euros en 2022. Pour mémoire, il s'établissait à 1,7 milliard d'euros en 2019 avant de plonger à 39,7 milliards d'euros en 2020 et 24,3 milliards d'euros et 2021.

Le déficit doit être analysé parallèlement à la dette. Celle de la sécurité sociale est divisée en deux compartiments, l'un à court terme et l'autre pour les échéances de plus d'un an.

Pour le premier, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui centralise la trésorerie du régime général, affiche à la fin de 2022 un endettement net de 12,5 milliards d'euros, ce qui représente une très nette amélioration par rapport à 2021, grâce notamment aux reprises faites en application de la loi organique que nous avons votée en août 2020. Cette année, l'excédent de l'ACOSS devrait s'élever à 6 milliards d'euros environ.

Le second volet de la dette est géré par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES). En 2022, elle a apuré 19 milliards d'euros, au-dessus de l'objectif initialement fixé à 18 milliards d'euros puis révisé à 18,6 milliards d'euros.

Cela signifie qu'au 31 décembre dernier, elle avait déjà remboursé 224,3 milliards d'euros et que 136,2 milliards d'euros restaient à son bilan, pour des transferts totaux de 360,5 milliards d'euros.

Venons-en aux recettes du régime de base et du FSV. Elles ont atteint 572 milliards d'euros en 2022, contre 538 milliards d'euros en 2021 et une prévision de 549 milliards d'euros. C'est donc une hausse de 6,3 % et de 4,2 % par rapport à ces deux bases, ce qui tient surtout à la progression de la masse salariale de 8,7 %.

Les cotisations de sécurité sociale représentent toujours plus de la moitié des recettes, 57,8 %, soit 330,4 milliards d'euros, et leur hausse a été de 5,7 %.

Du côté des impositions affectées, la contribution sociale généralisée (CSG) progresse de 8,1 %.

J'en viens aux constats et à l'approbation des dépenses des ROBSS pour l'année 2022. Elles atteignent 591,6 milliards en 2022, ce qui est supérieur de 3,7 % à la prévision initiale fixée par la LFSS pour 2022 et surtout de 4,3 % aux dépenses pour 2021.

Cette croissance importante confirme la capacité de notre sécurité sociale à faire face aux enjeux du temps et s'explique par deux raisons principales.

La première est la revalorisation exceptionnelle de 4 % des prestations servies par les différentes branches, votée dans le cadre de la loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat. En venant s'ajouter à la revalorisation annuelle traditionnelle et en s'appliquant à un grand nombre de dépenses, par exemple à plus de 80 % des dépenses de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), cette revalorisation anticipée a concouru très nettement à la croissance des dépenses des ROBSS. L'effet de cette double revalorisation a été particulièrement significatif pour la branche vieillesse, en raison de l'importance du volume des prestations servies. Cette branche est en effet la plus importante en termes de dépenses : celles-ci atteignent 262,8 milliards d'euros en 2022.

Ensuite, plusieurs mesures nouvelles ont soutenu le dynamisme des dépenses de sécurité sociale. Ainsi, les revalorisations salariales décidées dans le cadre du « Ségur de la santé » ont entraîné 2,7 milliards d'euros de dépenses supplémentaires pour la branche maladie.

Concernant l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), dont je rappelle qu'il est un agrégat de dépenses assurées par les branches maladie, AT-MP et autonomie, il s'établit pour 2022 à 247,2 milliards d'euros, soit 10,4 milliards d'euros de plus que la prévision fixée par la LFSS pour 2022.

Ce dépassement de l'ONDAM s'explique par le cumul des dépenses de soins de ville, notamment d'indemnités journalières, excédant la prévision, du financement de 2,7 milliards d'euros de mesures de compensation de l'inflation ayant principalement bénéficié aux établissements de santé, et de 700 millions d'euros de dépenses liées à des mesures exceptionnelles visant à renforcer l'attractivité des emplois proposés par ces mêmes établissements. Les dépenses liées au covid-19, si elles sont en net reflux par rapport à 2020 et 2021, ont également excédé la prévision de 6,8 milliards d'euros.

Un élément significatif me semble devoir être souligné : si l'ONDAM, toutes dépenses comprises, a crû de 2,9 % entre 2021 et 2022, l'ONDAM hors dépenses liées à la crise sanitaire a progressé quant à lui de 6 %. Deux conclusions peuvent en être tirées : tout d'abord, c'est la baisse des dépenses liées au covid-19 qui explique le ralentissement de la croissance de l'ONDAM. Ensuite, en excluant ces dépenses, la croissance de l'objectif reste extrêmement soutenue et bien plus rapide qu'avant la crise sanitaire.

Je souhaiterais enfin évoquer les dépenses de la branche autonomie. Si le dépassement de la prévision n'est que de 800 millions d'euros, les dépenses excèdent de 8 % celles enregistrées au titre de l'année 2021. Le financement des établissements sociaux et médico-sociaux a été tiré à la hausse par les extensions successives du « Ségur de la santé » et les financements affectés à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) traduisent les effets de la double revalorisation et de la croissance du nombre de bénéficiaires. Enfin, les compensations versées aux départements pour le financement de la prestation de compensation du handicap (PCH) et de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) sont en hausse, en raison notamment de la création de la PCH « parentalité » et des soutiens versés aux départements en compensation de l'instauration d'un tarif plancher des services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD), votée par nos soins dans le cadre de la LFSS pour 2022.

Ainsi, la branche autonomie, dernière-née de la sécurité sociale, fait d'ores et déjà les preuves de sa capacité à financer et à assurer le pilotage de mesures structurantes pour la politique de l'autonomie.

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