Intervention de Christine Engrand

Séance en hémicycle du jeudi 22 juin 2023 à 9h00
Accompagnement des élus locaux dans la lutte contre l'artificialisation des sols — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Engrand :

« Le législateur devrait cesser d'ériger en dogme, en recette miracle, en vérité absolue, des notions telles que le renouvellement urbain ou la densification, qui peuvent s'avérer pertinentes ici ou là selon la qualité des projets urbains qui les concrétisent, mais ne peuvent prétendre constituer la seule pierre de touche de la politique urbaine. » Ces mots justes, écrits en 2012, ne sont pas ceux du Rassemblement national ; ils sont issus d'un article de Sylvain Pérignon, ancien directeur de recherche au centre de recherches, d'information et de documentation notariales (Cridon) de Paris, intitulé « Densification, une vérité devenue folle… ». Neuf ans plus tard, en 2021, vous adoptiez la loi « climat et résilience », un texte bardé de contraintes normatives, relevant davantage de la pensée magique que d'une réflexion politique équilibrée sur la densification. Les députés du Rassemblement national n'étaient alors pas suffisamment nombreux pour s'opposer à l'application de ces objectifs inadaptés aux territoires – auxquels, chers collègues du groupe LR, vous n'aviez alors rien trouvé à redire, ce qui peut s'expliquer par le fait que les élections sénatoriales avaient déjà eu lieu…

Pourtant, notre présidente de groupe prédisait déjà l'échec de l'écologie punitive, dont le fameux zéro artificialisation nette, plus communément appelé ZAN, détient certainement la palme d'or. De ces objectifs, les plus drastiques d'Europe, la plupart des maires ne retiennent d'ailleurs que l'iniquité qui en découle : les communes qui ont le plus artificialisé ces dernières années peuvent continuer, tandis que les communes rurales ou peu peuplées, qui n'artificialisent que très peu, sont d'ores et déjà condamnées.

Dans votre frénésie normative, vous ne voyez pas de problème à contraindre indistinctement les communes de quelques centaines d'habitants et les immenses métropoles, avec toutes les conséquences que l'on connaît pour l'installation de services essentiels, qu'il s'agisse d'infrastructures sportives, de centres de soins ou de services publics, dans une pléthore de communes qui n'ont pas attendu le législateur pour faire preuve de sobriété foncière. En outre, on retrouve dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) une véritable éthique foncière chez les élus, souvent issus d'un milieu agricole qui ne nécessite pas de contraintes particulières. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 28 % des communes françaises représentent seulement 5 % de la consommation foncière du pays entre 2009 et 2021.

Mais parce que votre sens de la justice est voilé d'indifférence, vous allez au hasard et chacun de vos tâtonnements est comme un coup d'épée dans notre société exsangue. Ces tâtonnements ne relèvent pas de votre inconséquence, mais d'un véritable projet d'affaiblissement de la cellule communale et de stigmatisation des petits propriétaires. Sinon, comment interpréter la réaction de M. Marchive, qui assume pleinement le renchérissement des prix du foncier et la crise du logement ? Même repeinte en vert fluo, votre politique antisociale est trahie par vos choix d'aménagements. Aux aspirations à l'horizontalité pavillonnaire de 80 % des Français – selon l'Ifop –, vous opposez une fois de plus la verticalité : celle de vos immeubles fades et de vos décisions de cabinet.

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