Intervention de Isabelle Rauch

Séance en hémicycle du jeudi 13 juillet 2023 à 9h00
Restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Rauch, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation :

Il y a tout juste une semaine, nous nous réunissions, en commission mixte paritaire, avec nos collègues du Sénat, pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945. Les propositions communes des rapporteures ont recueilli l'approbation unanime des membres de la commission mixte paritaire. Ainsi, comme tout au long de la procédure d'examen de ce texte, le travail commun des députés et des sénateurs a permis d'aboutir à un large consensus au sein du Parlement, signe de l'engagement de la représentation nationale en faveur de ce texte historique.

La lecture des conclusions de la CMP permet de clore l'examen du projet de loi. Elle consacre l'adoption d'un nouveau dispositif administratif dérogatoire permettant à la puissance publique d'agir de la manière la plus juste et la plus rapide possible, en levant l'inaliénabilité des collections publiques et des musées de France sans recourir à la loi. Ce nouveau dispositif contribuera ainsi à rendre aux héritiers, aux ayants droit, la part de dignité, de culture, d'histoire qui a été dérobée à leurs familles lors des spoliations.

Au terme de l'examen du texte, je tiens à saluer à nouveau le travail effectué par le Sénat, qui a veillé à renforcer la transparence de la procédure de restitution, en introduisant la publicité des avis de la CIVS, ainsi qu'en prévoyant la remise au Parlement d'un rapport faisant état des biens culturels restitués. Ces mesures assureront la pleine information des ayants droit et de la représentation nationale.

Je remercie également mes collègues de l'Assemblée, plus particulièrement la rapporteure, Mme Fabienne Colboc, pour la qualité des ajouts apportés au texte lors de l'examen en commission, puis en séance. Nos échanges ont permis de compléter le projet de loi et d'harmoniser les dispositions introduites par le Sénat, afin que les nouveaux dispositifs soient pleinement opérationnels.

Enfin, je salue le travail de la commission mixte paritaire, qui a veillé, par des modifications d'ordre rédactionnel, à mettre en cohérence les nouvelles dispositions avec le code du patrimoine dans lequel elles s'insèrent.

Le projet de loi tel qu'il nous est soumis ouvre une nouvelle étape pour les institutions culturelles dont les efforts en matière de recherche de provenance et de réflexion sur la composition des collections seront d'autant plus valorisés qu'ils aboutiront plus rapidement à une restitution, lorsqu'elle est de droit. Si la loi permettra à l'avenir de ne plus soumettre au législateur la décision de restituer une œuvre identifiée comme spoliée, elle n'aboutira toutefois pas au dessaisissement du Parlement dans ce domaine. J'insiste, en tant que présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, sur la tâche qui nous incombe désormais : nous aurons à exercer une vigilance constante, notamment à l'occasion de l'examen du budget, sur les crédits alloués par l'État à la commission chargée d'instruire les demandes de restitution, la CIVS, ainsi que sur les moyens affectés aux organismes de recherche et de formation, qui ont un rôle essentiel à jouer en faveur du développement et de la diffusion des recherches de provenance. Cette attention est la condition de l'effectivité des dispositifs que nous allons adopter.

La représentation nationale aura également pour mission de préserver la mémoire des victimes des crimes commis entre 1933 et 1945 et de s'attacher au travail conduit par les acteurs institutionnels qui œuvrent pour la réparation. Les commissaires des affaires culturelles et de l'éducation l'ont à maintes reprises souligné lors de l'examen du texte : nous tenons à recevoir régulièrement les acteurs culturels et administratifs afin d'être pleinement informés sur l'avancée de l'identification des biens culturels ayant été spoliés et restitués.

L'examen de ce projet de loi au Sénat, à l'Assemblée nationale, puis en CMP, fera, je l'espère, figure d'exemple pour les deux textes à venir visant à établir un cadre pour les restitutions, d'une part, des restes humains, d'autre part, des biens culturels réclamés par des États, notamment africains. En effet, il nous faut souhaiter que le travail parlementaire sur ces textes cruciaux se fasse en bonne intelligence entre les deux assemblées, en concertation avec les acteurs institutionnels et culturels engagés depuis plusieurs années sur ces questions et à l'écoute des historiens susceptibles d'éclairer la réflexion législative.

Chers collègues, je vous invite donc à adopter le texte issu des travaux de la CMP, qui reflète le travail constructif de nos deux assemblées et qui marque un tournant historique pour la restitution de biens culturels spoliés entre 1933 et 1945.

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