Intervention de François Ruffin

Séance en hémicycle du mardi 4 octobre 2022 à 15h00
Fonctionnement du marché du travail — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

Je soutiens l'amendement de M. Delaporte. Tout à l'heure, mon camarade disait que vous faisiez cette réforme pour économiser des milliards. Il y a en réalité, je crois, un enjeu encore plus profond : le pouvoir.

Regardons ce qui se passait dans les années 1970 : le rapport de force était en faveur des travailleurs. Dans mon coin, il y avait des grèves tous azimuts, y compris dans le textile, et les syndicats – dont une CFDT à l'époque plus rouge que la CGT – arrachaient, mois après mois, hausses de salaires et embauches.

Que s'est-il passé ? Il y a eu la mondialisation. Dans le textile, les accords multifibres ont entraîné des délocalisations, d'abord dans les pays du Maghreb, puis à Madagascar, puis en Inde et en Chine. En dix ans, le textile a disparu de ma région ; le reste, notamment la métallurgie, a suivi.

Alors, comme le disait Henri Krasucki, secrétaire général de la CGT, au début des années 1980, « la peur a changé de camp ». Le chômage a installé la peur dans le cœur des salariés. Cela n'a pas cessé depuis, et l'on entend toujours ce refrain dans les entreprises : si tu n'es pas content, il y en a mille qui attendent. Cette pression oblige à accepter la précarité, les horaires impossibles, les bas salaires.

Aujourd'hui, enfin, il y a une éclaircie dans le ciel de l'emploi. Elle n'est peut-être que temporaire, le temps de la sortie de la crise du covid, mais elle sera peut-être plus durable, pour des raisons démographiques.

L'enjeu de cette réforme-ci, mais aussi de celle des retraites et d'autres que nous verrons peut-être, c'est donc d'étendre le réservoir de main-d'œuvre afin que la peur et le pouvoir restent dans le même camp. Voilà la question ! C'est une question de pouvoir.

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