Intervention de Joëlle Mélin

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 16h35
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoëlle Mélin :

Vous vous voulez rassurants, mais c'est sans compter avec la réalité des faits et les résultats de la politique que vous menez depuis déjà onze ans, dans la droite ligne des quarante précédentes années de destruction de notre système de santé par une politique d'austérité, de rabais, de mauvaises économies, de rabot et de négociations tarifaires toujours à la baisse.

L'Ondam que vous proposez crée une austérité mortifère. J'utilise ce mot volontairement : le dernier rapport de la Société française de néonatologie, qui porte sur les nouveau-nés de 1 à 27 jours requérant des soins critiques est à la fois symbolique de la situation générale et ahurissante.

Le taux moyen d'occupation des lits de réanimation réservés aux nouveau-nés est supérieur à 100 % pendant plus de 20 % du temps. La réanimation se fait donc souvent dans les couloirs. Un quart des services refusent des entrées critiques, faute de place. Les lits sont en outre très inégalement répartis. Le ratio souhaitable serait de 1 lit pour 1 000 naissances ; dans le Nord et l'Est, il est de 1,28, mais il tombe à 0,8 en Occitanie et 0,6 en Provence-Alpes-Côte d'Azur. C'est donc très insuffisant, malgré une baisse de la natalité de 15 %.

Les moyens humains sont tout aussi insuffisants ; les pédiatres sont épuisés, car 80 % d'entre eux travaillent plus de cinquante heures par semaine et 13 % plus de soixante-quinze heures. Près de la moitié font plus de cinq gardes par mois, voire plus ; certains travaillent les quatre week-ends d'un mois. La moitié a des troubles du sommeil, 17 % sont en burn-out ou en dépression.

Au total, 72 % des services de type 3 ont au moins un poste vacant, et 46 % deux ou plus. Quant aux infirmières, elles ne sont plus formées à la néonatologie depuis 2009. Dans au moins 80 % des établissements, elles sont pour un tiers peu expérimentées, peu formées. La fidélisation est difficile et les équipes instables. Plus de 70 % des jours d'hospitalisation se font en sous-effectif.

À cela s'ajoutent les difficultés chroniques de fonctionnement des hôpitaux et des maternités que nous connaissons bien.

La situation est donc alarmante. La mortalité néonatale a augmenté dans notre pays depuis dix ans : le premier mois de vie concentre 74 % des décès, et cette tendance s'accentue. En matière de mortalité infantile, nous sommes passés de la troisième à la vingtième place en Europe ; ce sont 1 200 décès qui auraient pu être évités chaque année. L'âge plus avancé des primo-parturientes ou l'augmentation des grossesses multiples n'expliquent pas tout : c'est bien l'état général de nos hôpitaux et de nos maternités qui est en cause.

On ne peut plus gérer la santé par le rabais, les déficits et les dettes. Il faut changer de point de vue et gérer les comptes de la sécurité sociale au lieu de les laisser filer ; dans le domaine de la famille, de l'emploi, de la santé, il faut mener une politique sous-tendue par une véritable stratégie.

Quand pensez-vous inverser votre stratégie, si vous en avez une ?

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