Intervention de Béatrice Descamps

Séance en hémicycle du mardi 5 décembre 2023 à 15h00
Pérennité des établissements de spectacles cinématographiques et accès au cinéma dans les outre-mer — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Descamps :

« Le cinéma, c'est un œil ouvert sur le monde ». Cette citation de Joseph Bédier, illustre philologue romaniste français, spécialiste de la littérature médiévale, et contemporain des débuts du cinéma de la fin du XIXe siècle, prend tout son sens lorsque l'on sait qu'il a passé toute son enfance et son adolescence à La Réunion. Sa famille, d'origine bretonne, s'était installée dans ce territoire ultramarin situé à plusieurs centaines de kilomètres du continent africain et à une dizaine de milliers de kilomètres de la France hexagonale et de l'Europe. La réalité de cet éloignement géographique n'a pas changé depuis.

Le tarif de la place de cinéma en outre-mer, soit 8 euros, est-il trop élevé ? Oui. Malgré une fiscalité plus avantageuse en outre-mer, et le fait que le coût de la vie et le taux de pauvreté y sont beaucoup plus élevés, le billet de cinéma est en moyenne plus cher que dans l'Hexagone.

En raison des spécificités de ces territoires, notamment de leur tissu économique et commercial, de l'état de la concurrence, ainsi que de la vie chère structurelle aggravée par une forte inflation persistante, les postes de dépenses essentiels tels que l'alimentation et le logement grèvent le budget des familles. Par ricochet, les dépenses liées à la culture et aux loisirs en pâtissent, compromettant l'accès pour tous à la culture et au cinéma.

Cette proposition de loi pallie l'incapacité des deux maillons essentiels d'une même filière à trouver un terrain d'entente, au risque de mettre en péril la situation financière des salles de cinéma en outre-mer, d'augmenter le prix du billet de cinéma et de grever le pouvoir d'achat des Ultramarins. Elle a vocation à amener toutes les parties prenantes à reprendre les négociations de manière apaisée afin d'aboutir à un compromis dans l'intérêt de tous.

Pour mémoire, lors de la présentation de ce texte au Sénat, Sylvie Robert, vice-présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, mettait solennellement en garde, en indiquant que la plupart des exploitants ultramarins – voire tous – ne survivraient pas à une hausse du taux de location, à moins d'augmenter le prix des billets à un niveau tel que les spectateurs ne suivraient pas. Quant au précédent ministre délégué chargé des outre-mer, Jean-François Carenco, il considérait même que les salles d'outre-mer étaient en « danger de mort ».

Face à cette situation regrettable, l'intervention du législateur vise, dans un souci d'intérêt général, à pallier l'absence d'accord commercial en proposant un dispositif équilibré. Faisant preuve de cohérence avec le rapport Tirot de 2018, demandé à l'IGF par le biais du CNC, ce texte consiste à plafonner le taux de location en outre-mer à 35 %.

Nous soutenons cette mesure et, par conséquent, nous ne partageons pas le point de vue du principal opposant à cette proposition de loi, un exploitant de salles de cinéma qui souhaite, étrangement, mieux rémunérer les distributeurs, au préjudice de sa propre rémunération et de celle de son seul concurrent dans un contexte de duopole à La Réunion.

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