Intervention de Aurélien Taché

Séance en hémicycle du mercredi 6 décembre 2023 à 14h00
Lutte contre les discriminations par la pratique de tests individuels et statistiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Taché :

Les discriminations sont un sujet important, trop peu discuté et, quand c'est le cas, rarement dans le but de proposer des solutions concrètes et ambitieuses. En France, les politiques publiques de lutte contre les discriminations accusent un retard considérable. Notre pays fait pourtant face à une réalité alarmante, notamment en matière d'accès au logement : d'après un testing réalisé par SOS Racisme, non seulement près de la moitié des 136 agences immobilières testées acceptaient ou choisissaient délibérément de discriminer les candidats au profil dit arabe ou noir, mais près d'un quart des agences s'étaient rendues complices de discrimination en laissant au propriétaire la possibilité de procéder eux-mêmes à ce tri. Dans un pays où se loger est déjà devenu si difficile, cette réalité est un coup de canif totalement inacceptable dans notre contrat social.

Autre exemple : la discrimination à l'embauche. Toujours d'après un testing réalisé par SOS Racisme, 45 % des agences d'intérim accepteraient, à la demande de leurs clients du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), de discriminer des profils en fonction de l'origine perçue des candidats.

Il en va encore ainsi des contrôles d'identité effectués par la police : selon la Défenseure des Droits, les jeunes hommes perçus comme noirs ou arabes font l'objet de quinze à vingt fois plus de contrôles que les autres.

Ces exemples, triste illustration de la réalité vécue par des millions de nos concitoyens – parfois même par nos collègues, comme l'illustre le témoignage de Carlos Martens Bilongo, que je salue –, ne peuvent plus nous laisser indifférents. Mais devant le niveau d'aveuglement de nos institutions face à l'existence et l'ampleur du problème, comment avoir une réponse à la hauteur des enjeux ?

À mes collègues qui réfutent les méthodes de testing, qui contestent l'objectivité de l'association citée ou qui choisissent simplement de mettre des œillères, je donne cet autre chiffre, qui émane du ministère de l'intérieur : en 2021, les services de police et de gendarmerie ont enregistré 12 500 infractions à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux, un chiffre en hausse de 13 %.

Comme l'illustre la terrible actualité de ces dernières semaines, nous assistons à une dramatique accélération de ces agissements. Tags de croix gammées à Paris, menaces envoyées à une mosquée de Valence : partout, les actions racistes se multiplient. Les murs d'une mosquée de la Manche ont même été tagués des mots « Un bon musulman est un musulman mort » – un avis que partageait sûrement l'agresseur de Mourad, ce jeune jardinier attaqué au cutter à Villecresnes. De véritables milices sortent désormais en toute impunité dans les rues de Lyon, Bordeaux ou Paris, aux cris de « Islam, hors d'Europe ! » ou « Français, réveille-toi, tu es ici chez toi ! ». Comme nous l'avons vu la semaine dernière à Romans-sur-Isère, les loups défilent à nouveau dans nos villes, parfois armés, avec la volonté de ratonner – sans qu'Éric Ciotti, interrogé sur le sujet par un journaliste, n'y trouve rien à redire. Chers collègues, c'est à se demander si la droite est encore réellement républicaine.

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