Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du vendredi 1er décembre 2023 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre :

Nous ne pratiquons pas la politique de tolérance envers les personnes ni expulsables, ni régularisables ; en Allemagne, cette politique, la Duldung, autorise les personnes à travailler même si elles sont en situation irrégulière lorsqu'elles ne sont pas expulsables – ce qui permet notamment de vérifier leur identité. Peut-être qu'une telle disposition manque dans le droit français. L'OQTF peut remplir néanmoins le même rôle : ne soyons pas hypocrites, nous savons que des décisions d'éloignement sont prononcées pour vérifier l'identité d'une personne sans savoir si celle-ci pourra retourner dans son pays – en effet, il se peut que la France n'ait plus de relations diplomatiques avec celui-ci, ce qui est le cas avec la Syrie et l'Afghanistan. Cette tolérance, qui existe dans de nombreux pays voisins, consiste à n'éloigner l'étranger que lorsque les relations diplomatiques sont rétablies avec son pays d'origine. Nous appelons cela une assignation au report, que nous traduisons par une décision d'OQTF, quand nos voisins appellent ce mécanisme la tolérance. Nous avons décidé de ne pas introduire un tel dispositif dans le texte, parce que les Allemands songent à l'abandonner car il pose des problèmes complexes et parce que certains auraient dit qu'il visait à cacher la vérité en cassant le thermomètre.

Là où je suis moins d'accord avec vous, madame Dupont, c'est qu'un Afghan enfermé dans une prison ou dans un centre de rétention administrative (CRA) peut retourner dans son pays. Il y a quelques semaines, un Afghan, partisan des talibans et condamné pour terrorisme, a quitté de lui-même la France pour repartir en avion en Afghanistan – s'il n'est plus possible de l'enfermer, je préfère qu'un individu comme lui retourne dans son pays. En outre, laissez l'administration et le juge se prononcer : la première n'est ni bête, ni méchante, et le second statue, en cas de recours, en appréciant la vie privée et familiale de la personne, les possibilités diplomatiques de son éloignement et, évidemment, sa dangerosité. Le droit actuel empêche tout recours du ministère devant le juge pour éloigner l'étranger ; tout le monde me disait que nous ne pouvions pas expulser Hassan Iquioussen, mais nous y sommes parvenus car nous avons réussi à prouver qu'il avait des liens de vie avec le Maroc.

Je comprends votre préoccupation, que nous ne pouvons néanmoins pas traduire dans le texte pour les raisons que je viens d'exposer.

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