Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du mardi 12 décembre 2023 à 15h00
Améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels — Présentation

Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé :

Aux côtés d'Aurélien Rousseau, je salue l'accord auquel l'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus sur ce texte. Je remercie particulièrement le rapporteur Frédéric Valletoux : ce texte traduit son engagement, celui du groupe Horizons et apparentés comme de la majorité, à proposer des solutions concrètes en faveur de l'accès aux soins dans les territoires et à donner aux acteurs de nouveaux outils et leviers d'action. Sa proposition de loi s'inscrit dans une continuité, celle d'une majorité à la tâche pour défendre des mesures en ce sens. Je pense bien sûr aux textes défendus par Stéphanie Rist ou par votre ancienne présidente de commission Fadila Khattabi. Ces initiatives sont complémentaires de l'action du Gouvernement. Je remercie donc tous les parlementaires, députés et sénateurs – je tiens à saluer tout particulièrement l'effort de la sénatrice Corinne Imbert –, qui ont travaillé dans un état d'esprit constructif pour faire aboutir ce texte.

En juillet dernier, j'avais présenté un plan d'action important en matière d'accès aux soins autour de quatre piliers : le recrutement de 10 000 assistants médicaux ; le développement de 4 000 maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) ; la généralisation des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) sur l'ensemble du territoire ; et le déploiement de 100 médicobus pour le fameux « dernier kilomètre », qui est si difficile. Ce plan doit permettre, d'ici à la fin du quinquennat, à 2 millions de Français supplémentaires d'avoir accès à un médecin. J'en ai réalisé un premier bilan d'étape lors d'un déplacement récent dans l'Orne. La dynamique est bonne sur l'ensemble de ces chantiers, sur lesquels nous avançons main dans la main avec l'ensemble des acteurs nationaux et sur le terrain.

En parallèle, face au manque de soignants, nous devons continuer d'élargir et de mieux utiliser les compétences de chacun grâce au partage de tâches entre professionnels de santé. En deux ans, ce sont presque vingt nouvelles délégations de tâches qui ont été décidées, souvent par le biais d'un travail parlementaire. Elles nécessitent aujourd'hui d'être pleinement déployées, mais surtout d'être mieux connues des patients. Il nous faut absolument, collectivement, améliorer la communication autour de ces nouvelles possibilités d'accès aux soins, qui demeurent trop peu mobilisées par nos concitoyens.

Cette proposition de loi s'inscrit pleinement dans cette dynamique, témoin de la volonté du Gouvernement et de l'ensemble des parlementaires, quels que soient leurs bancs, de proposer des mesures concrètes pour conforter notre ambition en matière de santé.

Avec l'article 1er , relatif aux territoires de santé, nous redonnons la main à l'ensemble des acteurs de terrain pour poser ensemble un diagnostic et trouver des solutions en faveur de l'accès aux soins, dans une logique graduée de responsabilisation. Voilà l'ambition de cette mesure qui s'inscrit parfaitement dans la dynamique du Conseil national de la refondation (CNR) que nous avons impulsée l'année dernière.

Je sais par ailleurs votre assemblée légitimement sensible à la nécessité pour les professionnels de santé de mieux se coordonner, notamment à travers les CPTS – au cœur de l'article 3. À l'initiative du groupe Renaissance, les professionnels de la santé scolaire pourront désormais intégrer ces structures. C'est un apport bienvenu. Notre objectif est de permettre à tous les patients, quel que soit le territoire dans lequel ils résident, de bénéficier des missions assurées par les CPTS. D'ici à la fin de l'année, une grande partie du chemin aura été réalisée, avec près de 85 % de la population couverte, soit plus de vingt points gagnés en moins d'un an. Nous nous approchons donc de notre objectif de 100 % de couverture, mais il faut poursuivre notre travail d'information et d'accompagnement de tous les professionnels, sur le terrain, pour promouvoir les CPTS.

Le texte touche également à un autre enjeu, celui de donner envie à nos étudiants de s'installer dans les territoires, et propose, là encore, des mesures utiles. Sans toutes les citer, je pense à l'extension du bénéfice du contrat d'engagement de service public (CESP) aux étudiants en odontologie, en maïeutique et en pharmacie dès la deuxième année, une évolution demandée par plusieurs groupes de votre assemblée. Je pense également à l'expérimentation visant à encourager, dans les lycées situés en zones sous-denses, l'orientation des élèves vers les métiers de la santé, qui correspond aussi à une demande formulée sur plusieurs bancs. Il nous faut mobiliser tous les leviers et ces dispositions vont dans le bon sens.

Parce que mieux articuler l'offre de formation et les besoins des territoires est une préoccupation majeure, l'article 5 bis du texte prévoit en priorité la prise en compte des besoins des territoires, puis celle des capacités de formation. Le Gouvernement entend et partage cette volonté de considérer les besoins spécifiques des territoires – je l'ai dit jeudi dernier, lors de l'examen de la proposition de loi du député Yannick Neuder, et je tiens à le redire. Toutefois, les capacités de formation des universités restent une réalité qu'il nous faut impérativement intégrer au raisonnement.

Pour renforcer la formation, parce que les sujets sont évidemment liés, nous devons mieux veiller à la sécurité et à la santé physique et mentale des internes en stage. Ce sera désormais dans la loi grâce à un ajout de Stéphanie Rist. Prendre soin de ceux qui nous soignent est un impératif qui me tient particulièrement à cœur.

J'en viens à la question des certificats infirmiers. L'article 2 quater C élargit l'expérimentation de la signature des certificats de décès par les infirmiers à l'ensemble du territoire national. Le Gouvernement partage bien entendu la volonté d'avancer sur ce sujet essentiel. Si je comprends la volonté, voire l'impatience du législateur, je rappelle que le décret et les arrêtés permettant d'engager la mise en œuvre de l'expérimentation dans six régions, pris en application de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023, ont été publiés le jeudi 7 décembre. Depuis l'automne dernier, nous avions mené un travail important avec l'ensemble des acteurs pour préparer le déploiement de cette expérimentation complexe dans les meilleures conditions. Étendre, moins d'un an après, l'expérimentation à l'ensemble du territoire l'empêchera d'être financée par le fonds d'intervention régional (FIR) et la soumettra à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), ce qui risque de poser des problèmes pratiques. Nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter.

Je voudrais enfin revenir sur les apports du texte concernant les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue). Cette proposition de loi, et je m'en réjouis particulièrement, prolonge notre ambition de simplifier le parcours d'autorisation d'exercice des Padhue : elle apportera davantage de souplesse dans la réalisation des stages de consolidation des compétences, dont la durée pourra désormais être limitée à six mois. Les parcours seront plus lisibles pour les Padhue et l'accès aux soins s'en trouvera amélioré. Je salue d'ailleurs les apports de la navette qui simplifie le parcours des Padhue dans les outre-mer et reconnaît mieux leur contribution essentielle dans ces territoires.

Le Gouvernement accueille donc favorablement les mesures issues des travaux de la commission mixte paritaire. Comme l'a rappelé le rapporteur, ce texte fait œuvre utile, avec pour valeurs cardinales la solidarité entre les territoires et les acteurs, et la confiance envers les professionnels.

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