Intervention de Béatrice Roullaud

Réunion du mercredi 10 janvier 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Roullaud :

Le titre de cette proposition de loi peut surprendre de prime abord, puisqu'elle viserait à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille sans que l'on sache vraiment ce que recouvre cette notion de justice patrimoniale. Comme si les conventions et actes passés en matière patrimoniale par-devant notaire ou avocat pouvaient aboutir à une injustice. C'est pourtant ce qui peut arriver en cas de divorce, où des situations déséquilibrées peuvent apparaître. Il est donc important de chercher à réduire ces déséquilibres. C'est aussi ce qui arrive lorsqu'un conjoint, par le biais de clauses de contrat de mariage, tire avantage de la dissolution du régime matrimonial alors qu'il a tenté de mettre fin aux jours de son conjoint.

Cette proposition de loi vise donc à remédier à trois types de situation.

Tout d'abord, il s'agit d'empêcher que le conjoint qui a attenté à la vie de son partenaire tire bénéfice des avantages matrimoniaux. C'est la moindre des choses. Nous approuverons donc non seulement l'article 1er, mais également les amendements destinés à le réécrire.

Il s'agit ensuite des situations qui aboutissent à priver un conjoint de l'exercice de sa profession en cas de divorce, en raison de la révocation automatique de la clause d'exclusion du bien professionnel figurant dans le contrat de mariage – car cette clause est considérée comme un avantage matrimonial révocable.

Enfin, le texte prend en compte le cas où la solidarité fiscale permet à un époux qui n'a pas payé ses impôts de les faire supporter par son conjoint après le divorce. Rappelons tout d'abord que le fait de se marier ou de se pacser crée une solidarité fiscale, ainsi d'ailleurs qu'une solidarité civile pour les dettes ménagères prévues par l'article 220 du code civil. La proposition traite seulement de la solidarité fiscale. Un époux divorcé ou un ancien partenaire pacsé doit régler les impôts que son conjoint n'a pas payés, et ce parfois trois ans après la séparation. Cette situation peut s'avérer dramatique. Comme l'a révélé le collectif des femmes divorcées victimes de la solidarité fiscale, dans 80 % des cas ce sont les femmes qui doivent payer ces dettes fiscales. Il apparaît injuste que des femmes seules, qui ont en outre la charge des enfants, soient acculées à payer la totalité de l'impôt, y compris celui dû par leur ex-conjoint. Le principe de la solidarité s'applique alors même qu'elles sont séparées de celui-ci depuis plusieurs années.

C'est cette injustice que la proposition veut réparer, et par conséquent notre groupe votera pour les articles qui portent sur ce sujet.

Nous réservons cependant notre vote en commission en ce qui concerne certains amendements, dont la rédaction pourrait conduire en pratique à supprimer toute solidarité fiscale. Il est certes nécessaire d'atténuer les effets de cette dernière, mais il faut aussi mesurer de manière responsable les conséquences financières pour l'État.

Marine Le Pen et le Rassemblement national auront été les premiers à demander la déconjugalisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Cette proposition qui œuvre pour davantage de justice sociale emporte donc tout naturellement notre approbation.

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