Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mercredi 17 janvier 2024 à 14h00
Instrumentalisation politique des élections des parents d'élèves dans les conseils d'école

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Bloavezh mat deoc'h ! Meilleurs vœux pour cette nouvelle année !

Nous parlons cet après-midi de l'instrumentalisation de l'école, un thème qui m'est cher. En tant qu'ancien professeur d'histoire, j'ai été témoin de ce phénomène. J'ai d'ailleurs parfois moi-même fait l'objet d'une instrumentalisation, puisqu'on a voulu me faire jouer un rôle dans une pièce qui n'était pas la mienne.

Quand on est professeur d'histoire, on sait que l'instrumentalisation existe dès lors qu'on a enseigné à partir de manuels qui s'inspirent de ce que l'historienne Suzanne Citron appelait le roman national. Créé entre autres par Ernest Lavisse et décliné ensuite sous différentes formes, ce récit n'est qu'une vision de l'histoire parmi d'autres, en l'occurrence celle de l'État qui fixe ainsi sa norme – il n'empêche que, s'agissant de certains faits historiques, la vision que l'on peut en avoir, par exemple, en Bretagne, se révèle parfois légèrement différente, voire très différente.

Les pères de la IIIe République, déjà, estimaient que leurs concitoyens n'étaient pas aussi français qu'eux, voire pas français du tout, et qu'ils le deviendraient grâce à l'école. Or considérer que les Français ne sont pas français, c'est un peu présomptueux. Cela nous a conduits à avoir parfois une vision un peu différente et décalée.

Aujourd'hui, l'école s'est en grande partie libérée de ces représentations. Elle vise l'émancipation des élèves, c'est-à-dire leur faculté à se forger leur propre point de vue et à faire des choix éclairés – ce qui me semble important.

Le rôle des parents me paraît essentiel, en ce qu'ils sont les premiers éducateurs – d'ailleurs, lorsqu'ils n'éduquent pas leurs enfants, cela rend le travail des enseignants beaucoup plus difficile. S'il est important que l'école sache accueillir et intégrer les parents, ceux-ci doivent aussi rester à leur place : ce n'est pas à eux qu'il revient de décider des programmes ni de la liberté pédagogique des enseignants. Ce principe me semble absolument nécessaire, car l'enseignant doit être capable de trouver les mots pour s'adapter à son public, pour prendre en considération l'élève – c'est très important car, à défaut, celui-ci ne progressera pas – et pour l'amener, non pas à détruire les outils dont il dispose à la maison, mais au moins à les compléter, à se forger un autre point de vue. Tel est, au fond, le chemin vers l'émancipation, qui est à mes yeux quelque chose d'essentiel.

Quant aux parents qui veulent instrumentaliser l'école à des fins purement politiques parce qu'ils ne sont pas contents de ce qui s'y dit, rappelons-leur qu'ils peuvent reprendre les choses à la maison en expliquant à leur enfant qu'il peut y avoir différentes visions sur tel ou tel point, et qu'ils sont eux-mêmes en désaccord avec ce qui a été dit en classe : en fonction de cela, l'enfant fera ses propres choix.

Pour ma part, je suis très attaché à la liberté pédagogique, qui offre la possibilité de présenter les évidences scientifiques qui sont les nôtres aujourd'hui. Je pense par exemple aux théories créationnistes : enseigner que la Terre s'est créée en sept jours pose un réel problème d'un point de vue scientifique,…

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