Intervention de Nadège Abomangoli

Réunion du mercredi 17 janvier 2024 à 10h15
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNadège Abomangoli :

La croissance économique de l'Afrique ralentit ces dernières années. En effet, la Banque mondiale prévoit une progression de 2,25 % en Afrique subsaharienne en 2023, soit une baisse de plus de 2 points en deux ans. Bien sûr, ce chiffre post-crise Covid cache de fortes inégalités régionales. Par exemple, l'Afrique de l'Ouest est beaucoup plus dynamique que l'Afrique de l'Est mais, au total, 50 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Ainsi, le continent est le premier bénéficiaire de l'APD à hauteur d'environ 50 milliards par an selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Monsieur Zinsou, en tant que président d'une banque d'investissement qui produit également du conseil aux États, sur quels secteurs les acteurs privés internationaux peuvent-ils réellement influer en termes de développement : santé, éducation ou secteur industriel ? N'y a-t-il pas une contradiction à imaginer une complémentarité réelle entre des fonds d'investissement, qui ont leurs intérêts propres, et les politiques publiques, dont l'APD, dans l'intérêt des peuples ? Comment est-ce perçu sur le terrain et constatons-nous, ces dernières années, une substitution dans l'esprit des citoyens entre gouvernance publique en faillite et gouvernance privée, ce qui serait pour nous un signe d'échec de l'APD ?

Par ailleurs, sur le plan politique, comme le disait Thomas Sankara, « il faut choisir entre le champagne pour quelques-uns et l'eau potable pour tous ». Or des logiques de puissance imposent régulièrement des dominations économiques et politiques à l'égard des pays les plus pauvres. Pendant des décennies, la France s'est appuyée sur des régimes despotiques pour asseoir son influence et sa stratégie reposait sur une illusion de stabilité qui, sur le temps long, a produit de l'instabilité. Ces derniers mois ont montré l'échec de cette lecture et de nombreux régimes issus de coups d'État font aujourd'hui peu de cas de la démocratie : ceux d'aujourd'hui ne sont pas forcément soutenus par la France, contrairement à certains d'hier. À vos yeux, est-il possible de déployer une stratégie d'APD sans clarifier les objectifs politiques des relations entre États africains et États occidentaux ? Certains font mine d'ignorer que ces relations politiques doivent évoluer et caricaturent les oppositions politiques qui pointent ces contradictions, ce qui est insuffisant.

Enfin, comment évaluez-vous l'action des Etats du groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), qui laissent entendre un objectif de dédollarisation des économies ? Cela peut-il seulement amplifier la remise en cause du franc CFA, qui est perçu comme un symbole de domination politique et économique de la France sur certains États africains ?

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