Intervention de Frédéric Mathieu

Réunion du mercredi 17 janvier 2024 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Mathieu, rapporteur :

S'agissant de la L2I, c'est compliqué de rentrer dans la machine, comme vous dites ! Il s'agit d'un domaine très sensible. On sait que les armées mènent des actions dans le champ informationnel. Mais il s'agit d'informations classifiées. Cela est en rapport avec notre proposition de créer une commission ad hoc, qui permettrait à une délégation de notre assemblée d'avoir une vision claire sur ce sujet, selon les mêmes modalités et le même type de fonctionnement que la DPR.

S'agissant du quantique, on nous dit qu'il faut lancer des études sérieuses sur la question. Je vais vous confier une anecdote sans vous dévoiler les acteurs concernés. En l'espace d'une matinée, au sujet de la dotation par l'État d'un ordinateur quantique, on a rencontré deux hauts décideurs qui auraient dû avoir les idées claires sur cette question. Lors de la première audition, on nous a dit que les investissements nécessaires pour se doter d'un ordinateur quantique seraient très élevés. Lorsqu'on a demandé combien, on nous a indiqué que cela coûterait au moins 100 millions d'euros. Pourtant, 100 millions d'euros, ce n'est pas si cher… et au même moment, nous apprenions que le surcoût du projet immobilier de la DGSE au Fort Neuf de Vincennes était de 185 millions d'euros… lors de la seconde audition, nous avons reposé la question. La personne que nous auditionnions nous a dit que le coût afférent était tellement élevé qu'on ne peut pas le chiffrer. Donc, dans la même matinée, nous avons eu une fourchette allant de 100 millions d'euros à l'infini en dilatation constante… on est dans le quantique cela dit, donc on passe de l'infiniment petit à l'infiniment grand !

Plus sérieusement, cela est triste car nous sommes persuadés qu'il y a des gens au sein des services qui savent très bien ce qu'il en est car nous avons la capacité en interne de faire ce type d'évaluations. Mais ce que cette anecdote montre, c'est qu'il y a deux options : soit l'information ne remonte pas au bon niveau, soit on ne se pose pas la question en haut lieu. Cela m'inquiète quant aux conseils politiques prodigués aux grands décideurs politiques. On préconise donc la conduite d'une étude pour connaître le coût, les délais et les partenaires européens éventuels avec lesquels cela pourrait être fait.

J'ai le sentiment que, s'agissant du quantique, on est à une époque similaire à celle du milieu des années 1930 avec l'atome : on sait que ça existe, on sait qu'il y a des potentialités, on sait qu'on pourrait en faire une arme… mais tout cela, on ne le saura que si on décide de se lancer dans le Projet Manhattan. Aujourd'hui, la France et l'Europe en sont à ce point-là. Il faut donc travailler ce sujet. Si le quantique s'affirme comme une réalité dans les années qui viennent, on est face à quelque chose en potentiel offensif qui est de l'ordre de la dissuasion nucléaire. La question est donc de savoir si on veut passer à côté ou non.

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