Intervention de Martine Froger

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 10h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Froger :

Depuis 2020, les témoignages de violences sexuelles ont secoué le monde sportif. On ne peut pas dire qu'avant, les victimes ne parlaient pas ; mais elles n'étaient pas entendues. L'avalanche de témoignages reçus par la commission d'enquête montre à quel point nous ne sommes qu'au début de la prise de conscience de ce phénomène d'une gravité absolue.

Notre groupe se réjouit de l'inscription à l'ordre du jour de cette proposition de loi déposée par le sénateur Sébastien Pla, que je salue. Les Jeux olympiques que nous accueillerons dans quelques mois doivent être l'occasion de renforcer l'exemplarité du monde sportif français, et certainement pas un prétexte à détourner les yeux ou à renforcer l'omerta. Plus que jamais, nous devons mettre fin à la culture du secret et de l'impunité. Nous devons protéger les mineurs de toute violence et nous assurer que les personnes qui les encadrent ne présentent aucun danger. C'est la responsabilité de tout un système qui est en cause, et au premier chef celle de l'État, qui délègue un service public aux fédérations.

Il faut avant tout mettre fin aux lacunes en matière de prévention. C'est l'enjeu du contrôle d'honorabilité des encadrants et des dirigeants, que renforce ce texte. En effet, le double contrôle du bulletin n° 2 du casier judiciaire et du FIJAISV est indispensable, dans la mesure où ces deux fichiers ne contiennent pas les mêmes informations et ne sont pas régis par les mêmes règles. Le caractère annuel du contrôle permettra une meilleure prévention dans la durée. Mais ce contrôle ne sera effectif que si les freins techniques au contrôle automatisé de toutes les fédérations sont levés.

Nous saluons l'ajout par les sénateurs de l'article 2, qui comble une faille juridique. Si le préfet peut prendre une mesure administrative d'interdiction d'exercer pour les éducateurs sportifs potentiellement dangereux, il ne peut pas en faire de même pour les dirigeants de club. Pouvoir sanctionner les dirigeants réticents à s'engager pleinement contre les violences commises au sein de leur club est pourtant indispensable afin qu'ils s'acquittent de leurs missions et veillent à la sécurité des mineurs. Néanmoins, il ne faut pas faire peser trop de responsabilités sur les épaules des dirigeants, qui donnent bénévolement de leur temps. Il pourrait être bon de préciser ce qui est attendu d'eux et ce qui constitue un comportement qui doit être signalé.

Les travaux de la commission d'enquête doivent nous inciter à amplifier notre politique de prévention, de protection et de sanction. Plusieurs autres recommandations du rapport devront être concrétisées rapidement : création d'une autorité indépendante extérieure au mouvement sportif ; conditionnement du versement des subventions à l'Agence nationale du sport (ANS) à la démonstration par les fédérations sportives de la bonne réalisation du contrôle d'honorabilité ; formation des bénévoles des clubs exerçant des fonctions d'encadrement, avec un module spécifique consacré aux violences sexuelles et sexistes. Des moyens renforcés, notamment pour les directions des ressources humaines des services départementaux, à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (SDJES), sont indispensables.

Dans l'attente de ces avancées, notre groupe soutiendra évidemment cette proposition de loi.

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