Intervention de Benjamin Lucas-Lundy

Réunion du mercredi 7 février 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenjamin Lucas-Lundy :

La lutte contre les dérives sectaires est nécessaire et louable. La Miviludes a connu un regain d'activité ces dernières années, tout particulièrement après la période du covid : les signalements ont augmenté de 33 % entre 2020 et 2021, et de 86 % depuis 2015. Je salue son action et celle de toutes les personnes qui y travaillent et œuvrent ainsi quotidiennement contre les dérives sectaires, au service des Françaises et des Français. Compte tenu de la croissance rapide et continue des signalements, mais aussi des nouvelles formes de dérives observées depuis quelques années, il y a bien urgence à légiférer.

Toutefois, avec ce texte, le compte n'y est pas. Le projet de loi se contente d'aggraver les sanctions pénales alors que, seules, celles-ci n'endigueront jamais le phénomène. Aucun sujet ne peut se réduire à sa seule facette pénale ; c'est aborder le problème par le petit bout de la lorgnette ; c'est inefficace, vain et contre-productif.

Le Gouvernement n'a pas, je crois, bien lu le rapport d'activité 2021 de la Miviludes, notamment sa troisième partie, « Prévenir et combattre le phénomène sectaire : la coordination de l'action préventive et répressive des pouvoirs publics ». En effet, s'il faut combattre les dérives sectaires, il faut aussi les prévenir. Ces deux actions doivent aller de pair, mais vous les séparez. Il faut une vision globale du phénomène, comme il faut associer plusieurs partenaires, notamment les acteurs de la santé – domaine de plus en plus touché, selon la Miviludes. Or, dans ce texte, il n'y a rien ou presque rien qui aille dans cette direction.

L'augmentation des dérives sectaires liées à la santé et au bien-être nous montre que les Français s'inquiètent, qu'ils voient des manques en la matière. Répondre uniquement par la sanction pénale, c'est traiter les conséquences plutôt que la cause : ce serait un coup d'épée dans l'eau. Prévenir, c'est aussi accorder une part importante à la santé dans le parcours de vie des Françaises et des Français – ce que ne fait pas le Gouvernement, loin de là. Il faut renforcer l'accompagnement pour que les citoyennes et les citoyens ne tombent pas sous l'emprise d'individus non professionnels qui profitent de la perte de confiance dans la médecine conventionnelle et de l'insuffisance de l'offre de soins.

Nous regrettons aussi que ce texte ne traite pas de la formation des professionnels amenés à prendre en charge les victimes des dérives sectaires, notamment les magistrats et agents de police ou de gendarmerie.

À cette étape, ce texte n'est donc pas satisfaisant : c'est une timide première avancée.

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