Intervention de Danièle Obono

Réunion du mercredi 7 février 2024 à 15h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Selon votre rapport, le marché carbone européen « n'a pas permis de donner un prix au carbone compatible avec les ambitions climatiques de l'Union européenne. Il est indispensable de ménager une porte de sortie. » Nous partageons cette conclusion.

Entré en vigueur en 2005, le système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne, qui avait pour objectif une diminution des émissions de gaz à effet de serre des secteurs industriels énergivores, des producteurs d'électricité et des compagnies aériennes, est un échec patent presque vingt ans plus tard. Le mécanisme de quotas gratuits a conduit les entreprises à mettre en place des stratégies de revente des droits à polluer qui ont permis aux industries les plus polluantes d'encaisser jusqu'à 50 milliards d'euros entre 2008 et 2019. En raison d'un prix du carbone bien trop faible sur le marché, il n'a pas contribué de manière significative à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. En ne prenant pas en compte les émissions liées au transport des importations, il a rendu impossible de réellement favoriser les productions écologiques et de proximité, jalon pourtant indispensable à la bifurcation idéologique. Surtout, le principe de marchandisation de droits à polluer sous-tend l'idée qu'à partir du moment où une entreprise paie, peu importe le prix, elle est légitime à polluer, et ce malgré tous les effets négatifs sur l'environnement, qui sont irréversibles et ne peuvent être compensés par l'argent. Il faut en finir avec ce système.

Il y a urgence : l'Organisation météorologique mondiale indiquait que l'année 2023 était la plus chaude jamais enregistrée et appelle à réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre. Nous devons basculer de la marchandisation à la planification de la bifurcation écologique. Le principe directeur de cette nouvelle politique – la règle verte – consiste à ne pas prélever sur la nature plus que ce qu'elle peut reconstituer, ni produire plus de pollution et de déchets qu'elle ne peut en supporter. Cela passe par plusieurs mesures. Dans les transports, secteur fortement émetteur puisqu'il concentre 31 % des émissions, il existe plusieurs solutions : l'augmentation du fret, l'interdiction des lignes aériennes pour lesquelles il existe une alternative en train, ou la mise en place immédiate d'un moratoire sur toutes les nouvelles infrastructures routières – comme l'A69 – ou aéroportuaires pour permettre un état des lieux des alternatives. En ce qui concerne les émissions de la France à l'étranger, l'instauration d'une taxe kilométrique aux frontières, fixée en fonction de la distance parcourue par les produits importés, permettrait de dissuader les délocalisations et l'importation de produits trop éloignés. Un moratoire sur l'ensemble des accords de libre-échange, ce grand déménagement du monde qui participe amplement à accélérer la crise, doit également être mis en place. Le mot d'ordre doit être « un protectionnisme écologique et solidaire » afin de relocaliser les productions essentielles dans notre pays et permettre l'autonomie.

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