Intervention de Frédéric Falcon

Réunion du mercredi 14 février 2024 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Falcon :

Cette proposition de loi a le mérite de soulever une véritable difficulté, à laquelle sont confrontés des millions de Français locataires : les exigences toujours plus fortes des bailleurs lorsqu'ils donnent un logement à bail. La crise du logement que nous traversons et dont Emmanuel Macron porte la lourde responsabilité après sept années d'inaction et de politique de rabot budgétaire, a considérablement raréfié l'offre de logements disponibles dans les marchés locatifs les plus tendus. Désormais, trouver une location devient un véritable défi pour des millions de Français, voire une mission impossible pour ceux qui n'ont pas la chance de présenter un CDI, une situation confortable ou un garant solvable – cette dernière exigence étant même imposée aux fonctionnaires, ce qui est une aberration complète.

La rareté de l'offre permet aux bailleurs de choisir leurs locataires parmi les meilleurs dossiers, excluant les plus précaires, les petits indépendants toujours plus nombreux avec l'ubérisation de l'économie, les étudiants et les publics les plus fragiles. Il est temps de réagir. Cette compétition pour se loger devient inacceptable.

Rappelons tout de même que la longueur des procédures d'expulsion engagées contre un locataire mauvais payeur après avoir actionné la clause résolutoire du bail – il n'est pas rare qu'elle atteigne vingt-quatre mois – pousse les bailleurs à réduire le risque de défaillance locative à son minimum. Dans ce contexte, nous pouvons comprendre les craintes des petits bailleurs qui cherchent à sécuriser leurs revenus fonciers. Or si la garantie Visale ou les garanties privées des loyers impayés existent, de nombreux Français restent non éligibles à ces dispositifs assurantiels.

Chers collègues socialistes, nous accueillons favorablement le principe d'une garantie universelle des loyers, mais permettez-nous d'émettre quelques réserves quant à ses conditions d'application. Avec la création d'une agence dédiée, par l'intermédiaire d'un nouvel établissement public, nous craignons les dérives d'une forme d'étatisation de la garantie des loyers, alors que la France souffre d'une suradministration.

Vous refusez le principe d'un système assurantiel, mais pourquoi ne pas associer les réseaux bancaires, les assurances ou La Poste pour la souscription à ce nouveau dispositif ?

La question de la responsabilisation du locataire se pose également. La garantie universelle des loyers a-t-elle vocation à couvrir indéfiniment les défaillances d'un locataire mauvais payeur ? Quels garde-fous avez-vous imaginés pour prévenir les abus potentiels de ce nouveau droit social ?

En outre, la question du financement est pour nous une difficulté. Estimé à 1,4 milliard d'euros, le coût de ce dispositif est financé par de nouveaux prélèvements ou impôts, alors que la pression fiscale a atteint son paroxysme sous Emmanuel Macron. Nous aurions préféré que vous imaginiez des ressources alternatives.

Enfin, un tel dispositif de protection doit s'accompagner de contreparties du côté du locataire : si celui-ci est mieux protégé, il est absolument nécessaire d'envisager parallèlement une réduction drastique des délais des procédures d'expulsion.

Pour toutes ces raisons et malgré une intention que nous estimons louable, le groupe Rassemblement national s'abstiendra sur cette proposition de loi, que nous jugeons incomplète, malheureusement financée par de nouveaux impôts et ruineuse pour les finances publiques.

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