Intervention de Thomas Ménagé

Séance en hémicycle du mardi 5 mars 2024 à 9h00
Questions orales sans débat — Apiculture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThomas Ménagé :

Comme le monde agricole en général, l'apiculture française est en crise. Elle doit affronter la concurrence déloyale imposée par un commerce mondial dérégulé. Cette crise inédite tient à plusieurs raisons.

D'abord, on ne parvient pas toujours à déterminer la provenance réelle du miel, ni la composition finale du produit. Les autorités de contrôle n'ont pas les moyens d'établir l'origine des importations, le parcours du miel étant rendu illisible par la succession des expéditions. Résultat : dans nos magasins, des miels étrangers – importés d'Ukraine, du Vietnam ou du Mexique – sont vendus à 1 ou 2 euros le kilogramme, alors que les coûts de production des apiculteurs français se situent entre 6 et 8 euros. En d'autres termes, les miels français ne sont pas en mesure d'affronter la concurrence des miels importés, dont la composition est souvent frelatée. Selon un rapport publié le 23 mars 2023 par la Commission européenne, 60 % des opérateurs ont importé au moins un lot soupçonné d'être frelaté par l'apport de sucres artificiels. UFC-Que choisir a confirmé que de nombreux miels contiennent des sirops sucrés à base d'amidon, de riz, de betterave ou de maïs – autrement dit, ce n'est pas du miel.

En raison de ces distorsions de concurrence, le cours du miel français est en baisse. Quelque 63 % des apiculteurs français ont du mal à commercialiser leur récolte de 2023 et sont amenés à stocker – ce que m'ont confirmé de nombreux apiculteurs de mon territoire, le Gâtinais, au cours des derniers mois. Placés dans l'impossibilité d'écouler leur stock, les exploitants ne disposent pas de la trésorerie nécessaire pour préparer la nouvelle saison, qui commencera dans les prochains jours.

Parallèlement à l'accumulation de tonnes de miel français dans les stocks de nos apiculteurs, nous constatons une hausse des importations, qui est inacceptable. Les exploitants ont besoin d'une aide d'urgence à court terme et de vrais changements à long terme. Ils attendent des mesures. J'adresse au Gouvernement des questions précises, qui appellent donc des réponses précises.

Premièrement, le Gouvernement compte-t-il suspendre ou prendre en charge les cotisations patronales et salariales dues à la Mutualité sociale agricole (MSA) ? Entend-il reporter les crédits en cours ?

Deuxièmement, prévoit-il des aides d'urgence pour les entreprises qui n'ont plus aucune liquidité et qui risquent de fermer dès cette saison ou de réduire leur cheptel ?

Troisièmement, le Parlement européen et les États membres se sont accordés pour renforcer les directives dites petit-déjeuner, notamment pour imposer un étiquetage plus clair du miel. Le Gouvernement peut-il préciser les modalités et les dates d'entrée en vigueur de ces évolutions ?

De manière plus générale, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour soutenir la production française de miel face à la concurrence étrangère ? Il pourrait par exemple enclencher des clauses de sauvegarde ou des clauses miroirs, ou encore instaurer un prix minimal à l'importation – on en débat en ce moment – afin d'éviter la concurrence déloyale. N'oubliez pas qu'en sauvant l'apiculture française, vous sauverez toute l'agriculture française, car la pollinisation assurée par ces magnifiques insectes que sont les abeilles est au fondement de la biodiversité et de toutes nos productions.

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