Intervention de Nicolas Dupont-Aignan

Réunion du mercredi 28 février 2024 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dupont-Aignan :

Les différentes interventions nous ont confirmé le caractère totalement fratricide de cette guerre tragique, ainsi que l'usure des deux belligérants. Nous sommes très loin du narratif du président de la République et de certains bellicistes. Ce narratif totalement irresponsable fait croire, ou veut faire croire, que les Russes vont attaquer la Pologne, les pays baltes et l'OTAN, ce qui est contradictoire avec l'analyse proposée ici de l'efficacité des sanctions, avec les difficultés de la Russie à maintenir son emprise sur le Donbass et enfin avec le rapport de forces conventionnel et nucléaire entre l'OTAN et la Russie.

Pourquoi cette manipulation mensongère, si ce n'est pour justifier d'aller toujours plus loin ? Monsieur le président de la commission, au risque de vous contredire, je considère que le président de la République a bien dit que l'envoi de troupes n'était pas exclu. Il a été désavoué par l'ensemble des pays européens, par les États-Unis et par l'OTAN, accélérant ainsi l'isolement de la France dû à ses fréquentes déclarations irresponsables et contradictoires.

Les propos des intervenants montrent également qu'aucune issue immédiate au conflit n'est envisageable. Aucun des deux belligérants ne peut l'emporter, alors que l'Occident se montre incapable de faire appliquer douze paquets de sanctions et qu'un treizième est annoncé. Dès lors, cette cicatrice au cœur du continent est-elle dans l'intérêt de l'Europe ? Est-il dans son intérêt de pousser la Russie dans les bras de la Chine et des 3,8 milliards d'habitants des pays du groupe des BRICS + (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, auxquels s'ajoutent l'Arabie saoudite, l'Égypte, les Émirats arabes unis, l'Éthiopie et l'Iran) ? Est-il dans son intérêt de se fâcher avec l'Afrique, où notre influence diminue ? Le bilan de la guerre est catastrophique pour l'Europe. En matière économique, la puissance industrielle allemande s'effondre et paie son gaz quatre fois plus cher. La diplomatie française perd son indépendance et son crédit. Quel est notre intérêt dans cette affaire ? Une voie vers la paix est-elle possible ?

Je vous invite à relire une conférence de presse tenue le 20 octobre 2000 par Jacques Chirac, Vladimir Poutine et Romano Prodi, alors président de la Commission européenne. On y entendait qu'il n'existait pas de voie possible sans l'existence d'une zone neutre tampon entre la Russie, d'un côté, et l'Union européenne et l'OTAN, de l'autre ; cette zone, c'est l'Ukraine. La création d'une zone démilitarisée, l'autonomie du Donbass et le retrait des troupes russes sont conditionnés par un cessez-le-feu. La France s'honorerait à proposer cette paix au moment où les deux belligérants sont épuisés par la guerre, contrairement à ce que veut faire croire le président de la République pour alimenter une rhétorique dangereuse.

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