Intervention de Tatiana Kastoueva-Jean

Réunion du mercredi 28 février 2024 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Tatiana Kastoueva-Jean, directrice du centre Russie-Eurasie de l'Institut français des relations internationales (IFRI) :

Environ 50 000 mères de combattants sont actives actuellement. Comme je l'ai indiqué, elles ont commencé en prenant de la distance par rapport à l'agenda politique. Elles ne se disaient pas opposées à la guerre mais seulement soucieuses de justice et préoccupées par la rotation des hommes au front. Ce mouvement est-il comparable à celui des mères de soldats au moment de la guerre en Afghanistan et en Tchétchénie ? À l'époque, les soldats étaient de jeunes conscrits souvent inexpérimentés et la voix des mères trouvait des conditions politiques bien plus favorables pour s'exprimer librement et se faire entendre des autorités.

La situation est très différente aujourd'hui. Les autorités russes rémunèrent grassement la participation à la guerre. Les combattants envoyés en Ukraine sont des volontaires très bien payés. Dès lors, le regard de la société russe sur l'action de ces femmes n'est pas du tout le même. La position des mères de soldats évolue vers une hostilité à la guerre. Leur action déplaît fortement au pouvoir russe, qui exerce sur elles une forte pression et n'hésite pas à payer pour les faire taire.

En ce qui concerne la compagnie militaire privée Wagner, tous ses combattants qui le souhaitaient sont passés sous l'autorité du ministère de la défense russe, qui les contrôle entièrement. Ces miliciens sont toujours présents dans différents pays d'Afrique. Il convient d'ailleurs de noter qu'ils cohabitent, si je puis dire, avec des milices privées américaines en République centrafricaine et l'évolution de cette cohabitation est à surveiller. Les membres de Wagner qui voulaient prendre leur retraite ont pu le faire aussi. Cependant, si la majorité des combattants a signé un contrat avec le ministère russe de la défense, il est difficile d'obtenir un chiffrage précis.

Les autorités russes ont retenu une leçon de l'affaire Wagner, à savoir qu'il convient d'empêcher que des ressources financières, médiatiques et autres soient concentrées entre les mains d'une seule et même personne qui ne serait pas contrôlée par l'administration présidentielle et le Kremlin.

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