Intervention de Sabrina Sebaihi

Réunion du mercredi 3 avril 2024 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabrina Sebaihi :

Un toit, est-ce encore un droit ? Difficile de le savoir, étant donné les différents textes adoptés dernièrement. De la rue à l'hébergement, de l'hébergement au logement, tout est bloqué, paralysé. À la rue, 330 000 personnes, femmes, enfants, personnes âgées, mères isolées, personnes en situation de handicap, mineurs isolés, se partagent des bouts de trottoir, de parc et de parking, dans le froid de l'hiver et la canicule de l'été ; 147 en sont mortes depuis janvier 2024, soit plus d'une par jour. Quand ils se pressent pour obtenir un hébergement en appelant le 115, dont les lignes sont souvent saturées, ils allongent la litanie des demandes non pourvues. Rien d'étonnant quand on sait que vingt écoutants sociaux, dans les bons jours, se relaient sur une période de vingt-quatre heures au 115 de Paris. Plus de 80 % des demandes de familles à la rue ne trouvent aucune réponse. Avez-vous l'intention d'augmenter significativement les moyens humains des services d'accueil et d'orientation et le nombre de places d'hébergement disponibles ?

Après ce parcours du combattant vient le moment de passer de l'hébergement au logement. À peine un tiers des personnes relevant du dispositif Dalo peuvent espérer une réponse favorable. Ce dispositif consacre le droit inaliénable au logement, mais plus de 2 millions de ménages répondant aux critères d'attribution d'un logement social attendent, faute de disponibilités et de logements adaptés à leurs revenus. Ils attendent parfois plus de dix ans – c'est le cas dans ma circonscription des Hauts-de-Seine. En Île-de-France, 72 % des demandeurs sont éligibles à un logement PLAI (financé par le prêt locatif aidé d'intégration), c'est-à-dire à un logement très social, alors même que ces derniers sont nettement moins agréés que les logements PLUS (financés par le prêt locatif à usage social). De quels moyens vous doterez-vous pour répondre aux demandes des locataires les plus précaires, qui relèvent du dispositif Dalo et du PLAI ?

Pour satisfaire tous les besoins en logement, il faudrait mettre en chantier plus de 500 000 logements par an, dont 198 000 logements sociaux ; pas 30 000 en trois ans ! Le secteur de la construction est en crise, faisant craindre des licenciements en cascade. Une décision de Bruno Le Maire a amputé le budget de votre ministère de quelque 300 millions d'euros et l'offre ne répond ni à la demande, ni aux besoins : quelles mesures structurelles prendrez-vous pour les secteurs de la construction et de l'immobilier ?

Enfin, pour atteindre notre objectif de neutralité carbone d'ici à 2050, quels moyens consacrerez-vous à la rénovation du parc de logements, à l'origine de près du tiers des émissions de gaz à effet de serre ? Il nous faut rénover plus de 300 000 logements par an pour respecter l'accord de Paris ; dans les meilleures estimations, nous en sommes à peine au sixième. On nous annonce 1 milliard de coupes budgétaires sur MaPrimeRénov'. Quelles seront demain les perspectives, lorsqu'il fera 50 degrés l'été dans les appartements mal isolés ?

Monsieur le ministre délégué, si vous souhaitez diminuer le nombre de personnes précaires, mal logées et forcées de squatter, ne faut-il pas déclarer le logement grande cause nationale ? Jamais dans notre histoire récente, le secteur n'avait connu de telles tensions ; jamais il n'y a eu autant de personnes à la rue, dans un logement précaire, en attente de logement social. Ce n'est pas en déplaçant les SDF pendant les JOP que vous résoudrez le problème. Nous attendons de vous de vraies solutions.

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