Intervention de Marc Fesneau

Réunion du mardi 5 mars 2024 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Marc Fesneau, ministre :

Nous avions déjà des volailles ukrainiennes, mais la conjonction de la baisse des droits de douane et de la crise en France a produit la situation que nous connaissons. Il me semble que nous devons réfléchir à l'information du consommateur et à l'étiquetage, européen ou national. Il faut pouvoir vérifier que des produits extérieurs à l'Union à vingt-sept ne sont pas vendus comme étant européens. La transparence a son intérêt.

J'en profite pour aborder la question du bien-être animal. C'est un sujet légitime de préoccupation, que je partage, contrairement à la caricature qui est faite de mes positions. En revanche, il ne doit pas être avancé pour en rabattre sur la souveraineté et la sécurité alimentaires. Je le dis clairement. Je ne laisserai pas d'autres que nous nourrir l'extérieur de l'Europe au seul motif du bien-être animal. Certains pays demandent des animaux vivants : il est normal d'essayer de travailler à l'amélioration des conditions de transport. Mais il ne faut pas qu'à la fin, Poutine puisse nourrir seul l'extérieur de nos frontières. Certes, nous aurions les mains propres, mais nous n'aurions plus de mains ! C'est l'illustration de la nécessité collective que nous avons de sortir de la naïveté.

S'agissant du modèle agricole, j'aime beaucoup les chercheurs, mais montrez-moi celui qui expliquera qu'il est possible de faire de l'agriculture sans fertilisation. Je vous assure qu'il faut de la fertilisation et des engrais – lesquels peuvent être de différente nature. Il n'y a pas d'agriculture sans fertilisation, il va falloir qu'on se le dise ! Ne nous focalisons pas sur les engrais, qui peuvent être minéraux ou organiques.

De la même façon, je veux bien qu'on fasse les grands soirs sans les produits phytosanitaires, mais on va vite collapser. On a privé les agriculteurs français, et seulement eux, de certains produits. Résultat, on ne produit plus ! Je ne dis pas que nous ne trouverons pas de techniques alternatives, mais pour l'instant, nous ne les avons pas. Nous sommes le gouvernement qui a engagé le plus de moyens dans ce domaine, à hauteur de 250 millions d'euros. Personne ne l'avait fait avant nous. Je suis donc très à l'aise sur ce sujet. Mais, tout comme la recherche médicale cherche depuis cinquante ans des vaccins pour contre certaines maladies, nous devrons arriver à dire en conscience que nous n'avons pas trouvé de solution alternative pour certains engrais. Je comprends l'impatience, mais il y a trois ans, on a affirmé avoir trouvé la solution pour la betterave : au premier aléa, nous avons perdu 40 % de production ! C'est compliqué – mais, oui, il faut chercher des alternatives.

La suspension du plan Écophyto, je le répète, visait à travailler sur l'indicateur. Cela n'a pas raboté les ambitions. Les programmes de recherche n'ont pas été interrompus, ni à l'Inrae, ni dans les instituts techniques, et on dépote ! Mon intérêt est qu'on trouve des stratégies alternatives et qu'on réduise les produits phytosanitaires, en particulier ceux qui causent le plus de risques, puisqu'à terme, ils seront éliminés : mieux vaut préparer les agriculteurs plutôt que les placer au pied du mur.

Oui, nous devons nous coordonner avec nos collègues de la défense, pour de nombreux sujets. Cela fait partie du travail que vous menez et qui nous incitera à réfléchir collectivement à la résilience que l'on veut organiser.

Oui, Monsieur Rancoule, il faut nourrir le peuple. Mais, vous qui êtes d'une terre viticole, si j'ai bonne mémoire, vous savez que le commerce n'est pas à la carte. Si l'Aude refuse les produits qui viennent d'ailleurs…

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