Intervention de Frédéric Petit

Réunion du mercredi 19 octobre 2022 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Petit, rapporteur pour avis (Diplomatie culturelle et d'influence – Francophonie) :

La baisse des crédits est enrayée avec une hausse de 11 millions d'euros. Celle-ci intègre le transfert d'Atout France au ministère de l'économie, ce qui met un terme à un vieux débat entre notre commission et celle des affaires économiques. La majeure partie des crédits supplémentaires sont dédiés à l'enseignement français à l'étranger.

Plusieurs opérateurs sont concernés par le programme 185. L'Institut français a entamé il y a dix-huit mois une réforme que j'appelais de mes vœux. L'Institut de français Paris, dont l'organigramme a été modifié, sera désormais à même de jouer un rôle de tête de réseau des 94 instituts français dans le monde.

Le travail entrepris il y a quelques années commence aussi à porter ses fruits pour l'Alliance française. La Fédération des alliances françaises, financée par l'État, regroupe les quelque 850 alliances disséminées dans le monde pour former un outil très agile, dont l'impulsion part du bas.

Campus France fait face à un problème technique, d'ordre informatique, qu'il serait étonnant que l'État ne parvienne pas à régler : l'opérateur ne peut pas assurer le suivi de ses subventions car la gestion des bourses qu'il distribue entre dans le budget des différentes ambassades.

Les difficultés de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) l'empêchent pour le moment de remplir son objectif – le doublement, avant 2030, du nombre d'élèves accueillis dans l'enseignement homologué en France. Je vous présenterai, sous forme d'amendement, deux propositions. Le poste, hautement stratégique, de directeur de l'AEFE doit être retiré du mouvement des diplomates et le directeur nommé au titre de l'article 13 de la Constitution. Par ailleurs, un comité de gestion des établissements en gestion directe (EGD) doit être créé au sein de l'AEFE.

Si je suis d'accord avec mon collègue rapporteur pour dire qu'il existe un problème de gestion des ressources humaines au Quai d'Orsay, je serai plus prudent dans l'analyse. Je considère que ce problème tient moins au manque de moyens qu'au refus de considérer qu'il existe, au sein de la diplomatie française, des métiers techniques. L'école d'Orient n'est pas celle qui prépare le mieux à encadrer un service de visas, dont le fonctionnement s'apparente davantage à celui d'une sous-préfecture. Nos diplomates sont de grands serviteurs de l'État, mais leurs compétences ne correspondent pas toujours aux spécificités des postes qu'ils occupent.

La feuille de route de l'influence de la diplomatie française, publiée en décembre 2021 par l'ancien ministre Jean-Yves Le Drian, trouve sa traduction dans ce budget. C'est un grand motif de satisfaction car les crédits ne sont plus saupoudrés mais octroyés selon des lignes directrices claires. La vision large et décloisonnée qu'elle promeut est en train d'infuser, les services se coordonnent. Je rappelle qu'il n'y a pas si longtemps, certains ambassadeurs ignoraient ce qui se passait dans le pays car l'information passait par d'autres canaux. Si je reprends l'exemple de la communication, l'administration a la possibilité de s'appuyer sur des locuteurs peuls : ils travaillent à France 24, chaîne du groupe France Médias Monde, placé sous la tutelle du ministère de la culture. Il s'agit simplement de casser les silos et d'apprendre à travailler ensemble. De ce point de vue, de grands progrès ont été réalisés dans les actions du programme 185.

La feuille de route définit des priorités géographiques claires, l'Europe revêtant un caractère essentiel pour la diplomatie d'influence. Or nos actions culturelles ne sont pas différenciées selon qu'elles sont menées au sein de l'Union européenne ou en dehors. Je le regrette car, en termes d'influence, l'ouverture d'un lycée français à Cracovie ou à Stuttgart n'a pas la même signification que l'ouverture d'un lycée français en Afrique subsaharienne ou en Amérique du Sud.

J'ai choisi cette année de me rendre en Géorgie, dans le voisinage de l'Union européenne. Ce pays, marqué par la guerre, accueille beaucoup de Russes que la diplomatie d'influence appelle « prioritaires ». J'ai pu constater que la feuille de route avait percolé sur le terrain. La conseillère culturelle y effectue un travail décloisonné, où tout a son importance, où tout est lié, depuis la présence au conseil d'administration du lycée français jusqu'aux contacts avec l'université franco-géorgienne, en passant par le soutien à un projet autour du vignoble, financé par le fonds de solidarité des projets innovants (FSPI). Elle ne se contente pas d'agir çà et là, elle mène des actions cohérentes.

En conclusion, j'insiste une nouvelle fois sur l'importance de lutter contre les silos, qu'il s'agisse de l'organisation de la diplomatie d'influence ou de notre action dans le monde. Je considère que la différentiation de nos actions en fonction des pôles géographiques est essentielle et que notre positionnement ne doit pas être le même lorsque nous agissons au sein de l'Union européenne.

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