Intervention de Gérard Longuet

Réunion du jeudi 22 septembre 2022 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Gérard Longuet, sénateur, premier vice-président de l'Office :

. – Je veux vous dire tout le bonheur qu'un sénateur d'un département agroalimentaire, à dominante de production laitière, ressent en entendant les différents intervenants. Je remercie Mme la rapporteure d'avoir mis ce sujet à l'ordre du jour. Si j'avais mauvais esprit, je dirais que le préfixe « ultra » est par définition négatif... Cela rend le débat passionné – tant mieux ! Je remercie les trois intervenants, qui ont tous apporté des éclairages majeurs.

Je souscris aux propos de M. Fardet sur les infrastructures et la logique du système, sujet ô combien important. Mme Touvier nous a montré combien nous devenions sérieux sur les excès des additifs. Toutefois, le principe de précaution ne devrait pas entraîner la paralysie. Mme Véronique Braesco préconise une approche plus empirique et mesurée.

En matière d'alimentation, la rareté n'est pas si éloignée et peut réapparaître à l'aune de la crise ukrainienne. Les additifs ont toujours pour effet de combattre le manque de production, et ce grâce au stockage et aux conditionnements divers. L'alcool est d'ailleurs une façon de conserver les fruits. À ce propos, l'apparition du chemin de fer a tué la vigne au nord de la Loire !

L'élargissement du marché peut conduire à des chocs culturels, car l'attitude à l'égard de la nourriture évolue. Ainsi, l'accès aux protéines animales – ancien en France, où la consommation de viande s'est généralisée à partir des XIXe et XXe siècles, et qui se développe en Chine – modifie les comportements alimentaires. En outre, l'action des protéines animales ingérées dans l'enfance influe sur la croissance.

Le stockage, l'élargissement des marchés et l'abondance de l'offre alimentaire aboutissent à une surenchère dans la diversité des produits et la politique des marques qui l'accompagne. On en vient ainsi à modifier les additifs pour flatter certaines tendances, sur la texture des aliments par exemple, dont l'acceptabilité culturelle peut varier selon les pays.

Il ne faudrait pas en venir à paralyser tout un secteur d'activité, par ailleurs extraordinairement créatif et très contrôlé, par l'application d'un principe de précaution conduisant à brider toute initiative. Cependant, il faut accepter le débat, fût-il conflictuel, pour tenter de concilier la diversité de l'offre et la recherche de produits nouveaux avec le souci d'éviter un apport d'additifs qui soit une source identifiée de troubles de santé. L'innovation n'est pas une réponse absolue en la matière, et retrouver une alimentation purement naturelle me paraît une idée illusoire digne de Bouvard et Pécuchet. Il serait raisonnable d'avancer sur cette question à l'aune du regard critique et amusé de Flaubert, sans interdire toute évolution. La démocratie permet d'en débattre sans s'enfermer dans des positions théologiques.

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