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André Chassaigne
Question N° 7739 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 9 mai 2023

M. André Chassaigne interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'indispensable renforcement des moyens de lutte contre la prolifération du campagnol terrestre et des mesures de soutien aux exploitants agricoles gravement touchés par les énormes dégâts provoqués. Chaque année, des milliers d'hectares de prairies sont dévastés par les rats taupiers (campagnol terrestre), faisant chuter brutalement la quantité et la qualité du fourrage produit ou récolté menaçant directement et à court terme la viabilité de nombreuses exploitations du Massif central. Ces rongeurs, dont la durée de gestation est de 21 jours et qui présentent un cycle de croissance pluriannuelle difficile à endiguer, creusent des galeries, rongent les racines des prairies et laissent sur leur passage de petites mottes, réduisant drastiquement la quantité d'herbe disponible pour le bétail. En outre, par leur densité jusqu'à 1 000 individus à l'hectare et le volume des excréments qui se mélangent à l'herbe ou au foin, ils peuvent transmettre des parasites ou maladies graves comme la listériose ou la leptospirose. Ils peuvent alors perturber et intoxiquer le bétail, contaminer les réserves d'eau du cheptel, voire du réseau d'eau potable, le fourrage récolté et même le lait quand celui-ci est utilisé pour la fabrication de fromages au lait cru. Cette pullulation s'explique en partie par le réchauffement climatique qui réduit la durée et l'intensité des périodes de gel et déclenche la reproduction du nuisible plus tôt dans la saison. Elle s'explique aussi par une population insuffisante de prédateurs naturels, comme le renard ou les rapaces, et par des techniques de lutte actuellement insuffisantes. Des exploitants tentent de limiter la pullulation, surtout en période de « basse intensité », par le gazage préventif des taupes, des pièges et des appâts empoisonnés, mais avec des effets très négatifs sur les prédateurs et malheureusement sans résultats significatifs, malgré l'importance des dépenses engagées. Outre de nouvelles mesures obligatoires impliquant tous les acteurs concernés, il est indispensable de renforcer la recherche publique pour aboutir dès que possible à de nouveaux moyens de lutte. Ceux-ci pourraient être de nature chimique, s'ils n'impactent pas les prédateurs, ou biologique, comme l'utilisation de phéromones ou de vaccins contraceptifs. En attendant la mise au point de ces nouveaux moyens de lutte, qui prendra sans doute du temps, l'État doit soutenir les exploitations touchées par ce fléau, souvent au bord de la faillite, en finançant l'achat ou l'utilisation en début de saison des moyens de lutte aujourd'hui disponibles et par l'indemnisation des pertes de récolte. Enfin, quelles suites ont été données au rapport Humbert-Pouzoulet publié, en octobre 2015, ayant mission d'appui auprès du préfet d'Auvergne dans la maîtrise du campagnol terrestre ? Il lui demande un renforcement des mesures de soutien aux exploitations touchées par le campagnol terrestre, une mobilisation des services et des outils de lutte déjà disponibles, ainsi qu'un état des lieux de la recherche scientifique et souhaite connaître les perspectives à ce sujet.

Réponse émise le 16 janvier 2024

Trois espèces de campagnols, le campagnol terrestre (rat taupier), le campagnol des champs et le campagnol provençal, sont susceptibles de provoquer des dégâts importants sur les productions végétales, à une échelle territoriale variable. Ces trois espèces figurent sur la liste nationale des organismes contre lesquels il est possible de maintenir une lutte obligatoire. En effet, une lutte efficace contre les campagnols ne peut être que collective et organisée à l'échelle d'un territoire. À ce titre, l'arrêté interministériel du 14 mai 2014 encadre la lutte collective contre les différentes espèces de campagnols. Il s'agit de maîtriser les populations de rongeurs par la lutte intégrée, c'est-à-dire en limitant au maximum l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et en combinant diverses méthodes, notamment préventives, parmi lesquelles figure la lutte contre les galeries de taupes. Ce cadre national est décliné localement par l'établissement d'un plan d'action régional « campagnols », dans chacun des territoires concernés, afin de renforcer l'efficacité de la lutte, en permettant qu'elle soit collective, préventive et précoce. Dans les départements du Cantal et du Puy-de-Dôme, compte tenu des alertes reçues au printemps 2022, la direction générale de l'alimentation a appuyé l'organisation de la lutte collective via une aide de 180 K€ pour l'animation et l'expérimentation de nouvelles méthodes de lutte. En parallèle, la lutte chimique repose principalement sur l'utilisation d'appâts au phosphure de zinc, qui agissent par la libération de phosphine, un gaz mortel, dans l'estomac après ingestion, sans pour autant laisser de résidu toxique dans les cadavres disponibles pour la prédation. Ces appâts s'appliquent dans les galeries de campagnols à l'aide d'une canne ou d'une charrue enfouisseuse, depuis 2021, mais ne doivent pas dépasser la dose maximale de 2 kilogrammes par hectare (kg/ha) par an. Dans ce contexte, au printemps 2022, à la demande des professionnels d'Auvergne, une première autorisation temporaire a été délivrée par le ministère chargé de l'agriculture pour augmenter la dose maximale à 4 kg/ha par an et permettre de renouveler les traitements après la fenaison. De plus, à l'automne 2022, une seconde dérogation a été délivrée par le ministère chargé de l'agriculture pour accorder un troisième traitement de 2 kg/ha, augmentant la dose maximale à 6 kg/ha par an. Ces dérogations sont néanmoins temporaires, et il revient au producteur du produit de demander à l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail une modification des conditions d'emploi dudit produit. Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé aux côtés des agriculteurs en consacrant aux méthodes de lutte contre le campagnol préservant la faune sauvage une enveloppe de 1,9 M€ sur la période 2016-2022. Ce financement porte sur des projets innovants, dont le projet PHEROCAMP, portant sur la communication phéromonale des campagnols terrestres, ainsi que le projet CONTRACAMP, porté par l'université Clermont Auvergne, visant à réguler les populations de rats taupiers par une approche vaccinale d'immuno-contraception. Enfin, l'institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement mène le projet ROBOCATS, qui a pour objectif de développer un dispositif robotisé air-sol destiné à la maîtrise des populations de ravageurs.

1 commentaire :

Le 25/02/2024 à 10:18, Christian Amblard a dit :

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C’est un vrai problème. Les prairies, notamment dans le Sancy, sont dévastées. Il me semble qu’une mesure de bon sens qui s’impose serait d’interdire la destruction des renards sur les communes touchées par les pullulations du rat-taupière. Le renard est son meilleur régulateur. Les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités. En attendant, les rats-taupières remercient chaleureusement les chasseurs qui détruisent les renards …

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