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Corinne Vignon
Question N° 10048 au Secrétariat d'état à la biodiversité


Question soumise le 18 juillet 2023

Mme Corinne Vignon attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur l'importation de trophées de certaines espèces menacées en France. En plus de représenter un accélérateur de la crise mondiale de la biodiversité en menaçant la survie des espèces chassées et en bouleversant les écosystèmes, cette pratique de chasse pose des problèmes de nature économique dans les régions où elle est pratiquée. En effet, les communautés locales ne bénéficient en rien de la poursuite de cette pratique. Une étude de l'université de Leiden, au Cameroun, démontre qu'en moyenne, seulement 3 % de l'argent de cette activité leur parvient et toutefois empêche le développement d'un écotourisme d'observation de la vie sauvage, beaucoup plus générateur d'emplois et de revenus pour les populations locales et de conservation de la biodiversité. D'autres études confirment cette tendance. Au vu de ces études, les scientifiques de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ont donc conclu que les avantages financiers de la chasse aux trophées pour les communautés locales semblent loin d'être aussi importants que le prétendent les organisateurs de chasse aux trophées. Aussi, elle souhaite savoir si le Gouvernement compte cesser de délivrer des permis d'importation pour les trophées de certaines espèces menacées.

Réponse émise le 31 octobre 2023

Le sujet de l'importation des trophées de chasse revêt une importance majeure au regard de la conservation des espèces concernées et des écosystèmes qui les hébergent. La question de l'importation des trophées doit être examinée dans le contexte de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Cet accord intergouvernemental réunit 183 pays avec pour objectif de garantir que le commerce international d'espèces animales et végétales sauvages ne menace pas la survie de ces espèces. Dans le cas des États membres de l'Union européenne, tous Parties à cette convention, le cadre réglementaire résultant de la CITES est fixé par le règlement (CE) n° 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce. Les pays adhérens à la CITES ont adopté, en octobre 2016, une résolution précisant « qu'une chasse aux trophées bien gérée est compatible avec la conservation des espèces et y contribue, dans la mesure où elle offre des possibilités aux communautés rurales d'améliorer leurs moyens d'existence, les incite à conserver les habitats et génère des bénéfices qui peuvent être investis dans la conservation ". Plus récemment, en juillet 2022, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a publié un rapport sur l'utilisation durable des espèces sauvages. Celui-ci a révélé qu'en Afrique 1,4 million de km2 sont gérés pour la chasse récréative. Ce rapport conclut notamment que les revenus provenant d'activités telles que la chasse fournissent un flux de revenus important et substantiel pour les agences de conservation et les communautés locales dans certains pays. Cependant, il a aussi conclu qu'il existe des différences considérables dans la manière dont la chasse récréative est régie et administrée dans différentes régions, ce qui rend difficile toute généralisation quant à sa durabilité ou non et que la chasse sélective d'espèces, d'individus ou de populations particulières qui présentent des caractéristiques particulières (par exemple, des animaux ou des cornes de grande taille) peut avoir un impact sur la structure et la conservation des écosystèmes. C'est pour cette raison que la Commission européenne et les États membres viennent de lancer une démarche spécifique aux trophées de chasse dans le cadre du Plan d'Action de l'Union européenne contre le trafic d'espèces sauvages. En premier lieu, ce plan prévoit de renforcer le contrôle des importations de trophées de chasse et, plus précisément, d'étudier la pertinence d'imposer un permis d'importation pour davantage d'espèces. Pour mener à bien cette action, le Groupe d'examen scientifique CITES de l'Union européenne étudie actuellement une liste de 146 espèces en prenant en compte leurs statuts de conservation, la tendance de leurs populations et le nombre de trophées importés dans l'UE au cours de la période 2012-2021. Il est important que la science éclaire les réflexions préalables à la prise de décisions. Par ailleurs, le commerce d'espèces menacées étant un sujet de compétence communautaire, il est essentiel que les adaptations réglementaires soient décidées au niveau de l'Union européenne, afin qu'elles s'imposent aux 27 États membres et ne donnent pas lieu à des divergences de régimes réglementaires au sein de l'Union. La France entend prendre toute sa part lors de ces échanges.

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