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Emmanuelle Ménard
Question N° 10451 au Ministère des ministère de l’Europe et des affaires étrangères


Question soumise le 25 juillet 2023

Mme Emmanuelle Ménard interroge Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les persécutions que subissent les Yézidis. Minorité la plus persécutée par l'État islamique, les Yézidis ont subi les pires exactions que l'on puisse infliger : massacrés, tués, réduits à l'état d'esclaves sexuels, l'EI a poussé 100 000 d'entre eux à s'exiler loin de l'Irak dès le déferlement de ses soldats en 2014 sur les monts Sinjar, au nord-ouest de l'Irak. Depuis, plusieurs dizaines de charniers ont été découverts, laissant entrevoir le martyre de ce peuple qui dit avoir déjà survécu à 74 « génocides ». Ce mot terrible - génocide - semble être plus que jamais d'actualité puisqu'en mai 2021, une équipe d'enquête spéciale de l'ONU a annoncé avoir recueilli la « preuve claire et convaincante » d'un génocide. Par ailleurs, une vingtaine d'organisations internationales ou d'organes parlementaires ont déjà reconnu le caractère génocidaire des violences subies en 2014. Face à cette haine débridée, la fuite a été pour beaucoup la seule solution et seulement quelques milliers sont retournés dans le Sinjar. Pour ceux qui ne sont pas rentrés - et que l'on pourrait croire en sécurité - la situation reste extrêmement complexe. Neuf ans après le drame, certains continuent d'habiter dans des camps de réfugiés, sous tentes ; une situation qui n'augure en rien un avenir meilleur. Face à ce drame, elle lui demande donc s'il ne serait pas temps de reconnaître les persécutions des Yézidis comme étant un nouveau génocide.

Réponse émise le 20 février 2024

Les crimes barbares dont a été victime la communauté yézidie sont bien documentées, y compris de manière officielle par l'équipe d'enquêteurs des Nations unies sur les crimes de l'État islamique en Irak (UNITAD) créée par le Conseil de sécurité avec le soutien actif de la France. C'est la raison pour laquelle la France s'est, très vite et au plus haut niveau, mobilisée en soutien à la communauté yézidie d'Irak. Le Président de la République s'est personnellement engagé auprès de la co-lauréate du Prix Nobel de la Paix, Nadia Murad, à accueillir 100 femmes survivantes yézidies et leurs familles en France. Ces femmes sont arrivées en France à partir de décembre 2018, où elles ont trouvé refuge et bénéficié d'une prise en charge, y compris sur le plan psychologique. Le soutien résolu de la France à la communauté yézidie se décline en trois axes opérationnels : favoriser des conditions de retour et de vie dignes et en sécurité pour les personnes déplacées, notamment au Sinjar, œuvrer pour la stabilité et le développement de l'Irak, et lutter contre l'impunité. En Irak, la France est engagée pour que les populations yézidies déplacées et de retour dans le Sinjar, bénéficient de soins de santé complets. Elle a financé en 2020 la réhabilitation du bloc opératoire du centre de soins primaires de la ville de Sinjar, qui permet, chaque mois, la réalisation d'une centaine d'opérations chirurgicales. Lancés en 2021, les travaux de construction de l'hôpital de Sinjar se poursuivent en étroite coopération avec l'organisation Nadia's Initiative - l'hôpital devrait ouvrir ses portes en 2024. Nous continuons parallèlement à œuvrer en faveur de l'assistance humanitaire et du développement dans la région. La France a notamment créé en 2015 un Fonds de soutien aux victimes de violences ethniques et religieuses au Moyen-Orient qui, à ce jour, a permis le financement d'une centaine d'initiatives à hauteur de 45 millions d'euros, dont 34 projets bénéficiant directement à la communauté yézidie. Sur le plan diplomatique, le Président de la République a pris un engagement ferme en demandant la réouverture du Consulat général de France à Mossoul, qui a compétence notamment au Sinjar. Cette ouverture est effective depuis juillet 2022 : elle complète, avec le Consulat général à Erbil, notre présence dans le nord de l'Irak et permet à la France d'être au plus près de toutes les communautés présentes dans la plaine de Ninive, y compris la communauté yézidie. La France s'est également engagée à enquêter sur les crimes commis contre la communauté yézidie et à lutter contre l'impunité de leurs auteurs, et participe activement au fonctionnement d'UNITAD, dont le mandat a été renouvelé en septembre dernier pour un an par le Conseil de sécurité. En coopération avec la Suède depuis janvier 2022, ainsi que la Belgique et les Pays-Bas depuis le 26 juin dernier, nous avons également constitué une équipe d'enquête commune, sous l'égide de l'Agence de l'Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (EUROJUST), pour identifier les membres des groupes armés impliqués dans les crimes perpétrés pendant le conflit en Syrie et en Irak. Les faits mettent en évidence le projet génocidaire de Daech. Nous constatons la progression de la qualification juridique de ces exactions depuis 2021, notamment en Allemagne et à la faveur des travaux d'UNITAD.

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