Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Éric Ciotti
Question N° 10631 au Ministère auprès de la ministre du travail


Question soumise le 1er août 2023

M. Éric Ciotti interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur les statistiques relatives à l'aide médicale d'État. En effet à l'heure actuelle, comme l'a soulevé le rapport sur l'évaluation du coût des soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière présenté par la députée Véronique Louwagie le 17 mai 2023, un certain nombre de données relatives aux bénéficiaires de l'AME sont aujourd'hui indisponibles alors qu'elles seraient pertinentes pour évaluer correctement ce dispositif. En particulier, il s'agit des données relatives à la nationalité des demandeurs et des bénéficiaires de l'aide médicale de l'État, qui n'est pas recueillie par l'assurance maladie, ainsi que de données rendant finement compte des soins prodigués au titre de l'AME. Ces données seraient pourtant très utiles, notamment pour identifier en les croisant d'éventuelles filières organisées d'immigration pour soins en recherchant des atypies dans la consommation des soins et en les recoupant avec des données sur la nationalité. C'est ce qui a été fait en 2021 par exemple en Seine-et-Marne, où l'identification d'un surcroît inexpliqué de demandes d'asile ukrainiennes a permis de démanteler une filière de fraude à l'allocation pour demandeurs d'asile. Par ailleurs, s'agissant du pilotage financier du dispositif de l'AME, il est impossible aujourd'hui de connaître le montant des dettes privées et publiques laissées par les patients non-résidents auprès des établissements publics de santé. Or ces données seraient utiles pour identifier les nationalités qui font peser le plus sur le système de santé français des dettes cumulées de personnes non résidentes et non affiliées en France. Aussi, M. le député demande à M. le ministre s'il compte prévoir la possibilité pour l'assurance maladie de collecter et de publier, de façon anonymisée, la nationalité des demandeurs et des bénéficiaires de l'aide médicale de l'État et les pathologies prises en charge au titre de ce dispositif. Il lui demande également s'il compte mettre en œuvre un traitement de ces données permettant d'identifier des filières d'immigration pour soins. Il lui demande enfin s'il compte prévoir un système comptabilisant les créances des personnes non résidentes et non affiliées en France pesant sur les établissements de santé français.

Réponse émise le 16 avril 2024

De nombreuses données sont collectées pour la gestion et le suivi de l'aide médicale d'Etat (AME) et font l'objet d'un travail de suivi et d'analyse par l'administration. Les documents budgétaires comportent ainsi des informations détaillées sur les bénéficiaires, l'instruction des demandes, les dépenses engagées et les résultats des différents contrôles menés. Il n'est en revanche pas possible de collecter des données à caractère personnel telles que la pathologie et la nationalité en vue d'identifier des filières de migration du fait de la sensibilité particulière de ces données. Celles-ci ne sont en effet pas nécessaires à la gestion du droit à l'AME et leur collecte serait, par conséquent, contraire au principe de minimisation qui est prévu par le registre général de protection des données (RGPD) qui est au coeur du droit européen de protection des données personnelles. La collecte de la nationalité des demandeurs et bénéficiaires de l'AME d'une part, et de la nature des pathologies prises en charge dans le cadre de l'AME d'autre part, ne serait donc pas conforme aux droits français et européen, d'autant que la nature de la pathologie est une donnée de santé, et fait à ce titre l'objet d'une protection renforcée.  L'AME est un dispositif visant à préserver la santé publique. Sa finalité est de délivrer des soins aux personnes irrégulières en situation précaire. Ces dernières années, de nombreuses réformes ont permis de renforcer la politique de suivi et de contrôle des dépenses d'AME afin de lutter contre toute forme de fraude. La lutte contre l'immigration irrégulière, qui relève des actions déployées par le ministère de l'intérieur, fait appel à d'autres outils de politique publique.  Par ailleurs, les dépenses d'AME sont financées par le budget de l'Etat et sont donc sans lien avec les dettes publiques et privées des établissements de santé. Toutefois, nous disposons de données en provenance de l'Assurance maladie concernant les créances françaises à l'égard d'autres Etats, c'est-à-dire la dette publique. Ces données sont traitées par le centre national des soins à l'étranger, dont le rapport de 2022 fait état de 804,4 millions € remboursés à ce stade à la France par 43 pays et de 946,1 millions € présentés au remboursement par la France aux organismes étrangers. Ces données couvrent des créances de sécurité sociale, au titre des règlements européens, conventions bilatérales et décrets de coordination, mais ne couvrent pas les dettes laissées par des patients non affiliés, non reliés à l'un de ces trois dispositifs, c'est-à-dire la dette privée, plus complexe à recouvrer.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion