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Jean-Yves Bony
Question N° 11962 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 10 octobre 2023

M. Jean-Yves Bony appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs sur les produits et matériaux de construction pour le secteur du bâtiment (REP PMCB), issue de la loi « AGEC ». Force est de constater que la mise en place de la REP PMCB vient accentuer un déséquilibre préexistant entre le bois et des matériaux carbonés comme le béton ou l'acier et fait peser le risque d'en stopper le développement à très court terme du bois et le développement de son usage pour atteindre la neutralité carbone, En effet, les coûts que doivent supporter les producteurs de bois pour la prise en charge du recyclage de leurs produits en fin de vie est beaucoup plus élevé que ceux appliqués pour les producteurs de béton ou d'acier. À cela s'ajoute le fait que ce sont les industriels de la première transformation du bois (scieurs, trancheurs, dérouleurs de bois) qui devront s'acquitter de l'écocontribution à destination des éco-organismes chargés de la collecte et du recyclage des produits en fin de vie, alors qu'il était prévu initialement que le contributeur soit le dernier acteur industriel ayant transformé ou assemblé les produits et matériaux avant-vente. Ainsi, pour 2023, les scieurs doivent payer 2 % de leur chiffre d'affaires au titre de cette REP. Il sera demandé 5 % en 2024 avec une montée en puissance entre 10 et 15 % à horizon 2024. Infliger une deuxième TVA au bois, matériau de la décarbonation, n'est pas le meilleur moyen de le développer quand dans le même temps les produits énergivores comme le béton ou l'acier sont mieux traités. Le signal est incohérent d'un point de vue écologique. Par ailleurs, cette écotaxe se met en place dans un contexte de concurrence déloyale vis-à-vis du bois d'importation qui est particulièrement visé par un comportement malhonnête qui tend à éviter de payer les sommes dûes. Ce système est profondément inadapté à cette filière puisque dans les territoires, le bois de déconstruction est aujourd'hui totalement trié et valorisé avec une valeur positive pour la production de panneaux ou à défaut en énergie. Le déchet bois a une vraie valeur écologique et environnementale et est intégré dans un circuit de valorisation vertueux. La survie de ces entreprises est en jeu malgré leur volonté de continuer à être acteur de la souveraineté industrielle et de la neutralité carbone du pays. La Fédération nationale du bois (FNB), qui représente 1 500 entreprises (dont 90 % de PME) s'inquiète pour l'avenir des entreprises de la filière bois. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer les mesures que le Gouvernement entend prendre pour faire face à l'insoutenabilité des contributions demandées et en matière de concurrence déloyale.

Réponse émise le 5 décembre 2023

La loi anti-gaspillage de février 2020 a créé la filière à responsabilité élargie des producteurs de produits et matériaux de construction du bâtiment. En effet, compte tenu de l'absence d'exutoires pour les déchets de chantiers des professionnels du bâtiment, et de la multiplication des dépôts sauvages de déchets, qui avait conduit au tragique décès du maire de Signes dans le Var le 5 août 2019, le Parlement avait décidé de soumettre la collecte, le tri et la valorisation des déchets du bâtiment à la responsabilité élargie des producteurs. S'agissant d'une filière comportant de très nombreux acteurs, la définition du cahier des charges de la filière, et l'agrément des 4 éco-organismes qui à la fois collectent les éco-contributions des entreprises metteurs en marché des produits et matériaux de construction et organisent la collecte et soutiennent les collectivités locales participant à la collecte de ces déchets pour les particuliers ou les professionnels, a été pleinement effective au début de l'année 2023. Si dans un premier temps, les éco-organismes avaient défini en septembre 2022 le montant des éco-contributions qu'ils appellent, en tenant compte de la trajectoire de montée en puissance des soutiens à accorder aux nouvelles installations de collecte et de tri à mettre en œuvre, plusieurs d'entre eux ont finalement décidé de revoir à la baisse ce montant fin 2022, remettant en cause leurs engagements de déployer des points de collecte des déchets triés comme ils s'y étaient engagés. De fait, alors que les points de collecte et les actions à mener en 2024 nécessitent des moyens supplémentaires, ces éco-organismes n'ont d'autre choix que d'augmenter le montant de l'éco-contribution à appeler pour 2024. C'est effectivement une augmentation d'éco-contribution plus importante qui est demandée à l'ensemble des producteurs de produits et matériaux de construction, sachant que la collecte et le recyclage du bois est l'un des postes les plus coûteux aujourd'hui dans cette filière. Elle a conduit au moins un des éco-organismes à augmenter l'éco-contribution des acteurs de la filière bois, tout en prévoyant, comme la loi le lui permet, de répartir cette augmentation de contribution sur les producteurs d'autres matériaux, comme l'acier ou le plâtre.  La décision de faire contribuer les producteurs de matériaux très en amont de la filière, au lieu de faire contribuer des producteurs de produits finis, par exemple les charpentiers qui livrent des éléments préfabriqués sur les chantiers, conduit en termes d'affichage à une augmentation potentielle du prix des produits plus importante. Ce choix a été motivé par la très forte opposition des professionnels du bâtiment d'eux-mêmes de contribuer au financement de la filière, ce qui est regrettable car ils en sont avant tout les principaux bénéficiaires en mettant à leur disposition toute une infrastructure qui manque cruellement aujourd'hui. Les éco-organismes ont le devoir vis-à-vis de leurs adhérents, de rechercher et de relancer les entreprises non-contributrices. Or, à ce stade, aucun effort n'a été entrepris pour identifier ces non contributeurs, contrairement au fonctionnement normal de ces éco-organismes. De fait, s'il y a des entreprises non-contributrices, il est difficile pour les services de contrôle de l'Etat de les poursuivre. Des discussions sont en cours avec les metteurs en marché et les éco-organismes, mais les solutions proposées à ce stade par ces derniers ne sont pas suffisantes pour permettre une juste sanction des non contributeurs. Il importe avant tout que la filière à responsabilité élargie des producteurs de la filière des produits et matériaux de construction monte en puissance selon le calendrier prévu, afin de pleinement lutter contre les dépôts sauvages, et que l'ensemble des acteurs concernés se mobilisent pour atteindre cet objectif.

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