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Alexis Corbière
Question N° 15376 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 20 février 2024

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M. Alexis Corbière alerte Mme la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la mise en place de classes de niveau dans les écoles publiques. Le 5 décembre 2023, Gabriel Attal, alors ministre de l'éducation nationale, a annoncé son souhait d'instaurer la démultiplication des classes en « groupes de niveau ». Le dispositif, qui devrait être instauré dès la rentrée 2024 pour les élèves de 6e et de 5e, ferait que les élèves d'une même classe seraient séparés en trois groupes pour les cours de mathématiques et de français, selon leur niveau et seront donc, pour ces matières représentant un tiers des heures d'enseignement, répartis avec des élèves d'autres classes. Depuis cette déclaration, le corps enseignant, les chefs d'établissements, les syndicats et les représentants des parents d'élèves ont unanimement exprimé leur rejet de cette réforme, tant sur le fond que sur la forme. Premièrement, comme le montrent de nombreuses études, les recherches sur le sujet montrent que les classes de niveaux bénéficient surtout aux élèves les plus performants puisqu'elles améliorent leurs résultats. En revanche, elles ont un effet négatif sur les élèves dont le niveau est plus faible. Ainsi, si l'objectif est de favoriser l'amélioration moyenne du niveau, les classes hétérogènes sont globalement plus profitables alors que les classes de niveau renforceraient en réalité une homogénéité sociale. Elles renforceraient les inégalités scolaires entre les sexes et selon l'origine ethnique pour aboutir à une ségrégation scolaire. Enfin, l'existence des groupes de niveau ont un fort impact sur l'estime de soi des élèves et, être dans le groupe dit « des faibles », aurait un effet psychologique négatif pour ceux ayant le plus besoin de soutien. Ce dispositif inégalitaire empêcherait les élèves de progresser, en plus de créer un mal-être et un isolement pour les enfants, qui se retrouveraient classés et triés dès leur entrée en collège. Cette mesure instaure un tri social qui conduirait vers plus d'injustice et de déterminisme, mettrait fin au collège unique et se retrouverait finalement en totale opposition avec le projet d'une école publique émancipatrice, permettant de faire réussir les élèves sur des objectifs identiques. Face à l'opposition ferme et unanime, le Gouvernement tente tant bien que mal de camoufler sémantiquement son projet, en utilisant désormais des expressions comme « groupes tremplins », « groupes de besoin ». Deuxièmement, sur le plan logistique, alors que l'école publique souffre depuis des années d'une forte baisse chronique de moyens sous les gouvernements successifs, la mise en place du dédoublement des classes et par conséquence des enseignants, nécessiterait d'augmenter le nombre d'heures de cours, pour arriver à 4 h 30 de français et de maths par semaine et par groupe. Alors que le ministre annonçait la création de postes pour « qu'il y ait une quinzaine d'élèves en groupe 1 », il n'y a toujours pas un enseignant devant chaque classe actuellement tout comme il n'y a pas, non plus, suffisamment de remplaçants. Or selon les taux avancés par le ministère, il faudrait environ 7 700 postes pour assurer la mise en place de la réforme à la rentrée 2024. La réalité rattrape les propos de M. Attal. 480 postes de second degré public ont été supprimés dans la loi de finances pour la rentrée 2024. 1 850 postes n'ont pas été pourvus dans le second degré à l'issu des concours de recrutement. Pour le CAPES externe, ce sont 861 postes non pourvus. Enfin, les mathématiques perdent 250 postes, soit près de 20 %, tandis qu'en lettres, ce sont 242 postes non pourvus. De plus, les textes présentés au Conseil supérieur de l'éducation le 8 février 2024 montrent que les coupes budgétaires se poursuivent dans l'école publique et ce, aux dépens des élèves les plus fragiles. Ainsi, dans le meilleur des cas, la création des groupes de niveau et des prépa seconde se fera à moyens constants. Cela veut dire qu'il faudra prendre des moyens sur d'autres matières telles que les langues, la science ou encore sur les options comme le latin, ce qui risque de générer des tensions entre les disciplines. Dans une interview au quotidien régional Ouest-France parue le 13 février 2024, Mme la ministre s'est dite « totalement opposée au principe de filiarisation pour les collégiens » et a précisé que le risque qu'elle ne laissera pas advenir, c'est celui de « la sélection par l'échec, un refus de mixité scolaire et sociale dans les classes. ». Or cette mesure de groupe de niveau représente tout ce qu'elle rejette et n'améliorera en aucun cas les conditions de vie à l'école, ou un prétendu « niveau », mais elle contribuera au contraire à désorganiser davantage le fonctionnement des établissements. Elle organisera et légalisera un tri entre les bons et les mauvais élèves en réduisant encore les droits, les enseignements et les aides pour ceux qui n'ont comme seule richesse l'école publique ; c'est-à-dire les élèves majoritairement issus des classes populaires. Face à la panne de la politique éducative du Gouvernement et alors que Pap Ndiaye préconisait encore timidement la mixité sociale avant d'être révoqué par Emmanuel Macron, Gabriel Attal a fait le contraire. Le choix du nouveau Premier ministre marque bien une nouvelle politique éducative et une vision réactionnaire et droitière de l'école : promouvoir une élite scolaire en délaissant la réussite d'une majorité. Cette réforme est un « choc contre les savoirs » qui ne fera qu'aggraver un séparatisme scolaire déjà existant et créera une école encore plus élitiste. Cette école à deux vitesses abandonnera les élèves issus des milieux populaires qui sont souvent les plus en difficulté et mettra de côté la question, pourtant primordiale, des inégalités sociales. Pour le bien de l'école publique et des élèves, il est impératif d'abandonner cette mesure. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse

Cette question n'a pas encore de réponse.

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