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André Chassaigne
Question N° 15927 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 12 mars 2024

M. André Chassaigne interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la fixation des prix en viticulture et la création d'une organisation professionnelle viticole. À la suite de la condamnation de deux négociants bordelais pour pratique de prix abusivement bas et de l'annonce par le Président de la République de prix planchers pour les productions agricoles, de nombreux viticulteurs s'interrogent sur la prise en compte par leur filière de ces deux évènements majeurs. Ils demandent que la fixation du prix de leur production se fasse en respectant leurs coûts de production et que les négociations puissent se dérouler sur la base de leurs propositions. Or aujourd'hui, notamment dans le Bordelais, les producteurs, qui sont aussi les porteurs de stock, ne sont pas les metteurs sur le marché. De fait, ils doivent se soumettre aux grossistes et négociants, eux-mêmes sous la pression des distributeurs. Alors que les viticulteurs sont aussi concernés par les nouvelles garanties de rémunération données aux producteurs agricoles, fondées sur une construction du prix inversée, cette évolution est d'ores et déjà bloquée pas des maisons de négoce bordelaises qui continuent à imposer des prix ne permettant pas une rémunération correcte des producteurs. Pour cela, via les courtiers, elles leur soumettent des avenants aux contrats CIVB (Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux) contraignant le producteur à attester qu'il n'a fait aucune demande de prix préalable. L'objectif est de maintenir des prix abusivement bas sous le prétexte qu'ils seraient librement consentis. Aussi, à l'encontre de la position dominante et sans partage de certains négociants sans scrupules, de nombreux viticulteurs ont pris la décision de créer en viticulture une première organisation de producteurs (OP) dans le but de planifier et organiser le marché du vin, évaluer un prix plancher et créer des contrats cadres. Ils considèrent que c'est le seul moyen leur permettant d'agir en toute légalité en matière de formation des prix. M. le député demande à M. le ministre les actions qu'il compte conduire pour que le secteur viticole respecte les prescriptions réglementaires sur la fixation des prix à la production. Il souhaite aussi connaître sa position sur la mise en place d'une organisation de producteurs dans la filière viticole et la nature du soutien qui pourrait lui être apporté.

Réponse émise le 16 avril 2024

Le 22 février 2024, le tribunal de commerce de Bordeaux a fait pour la première fois application de l'article L. 442-7 du code de commerce, créé par l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 portant refonte du titre IV du livre IV du code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées. Dans le cadre de cette décision de première instance, susceptible de réformation en appel, il a été jugé que les deux sociétés de négoce en cause ont pratiqué des prix abusivement bas. Elles ont ainsi été condamnées au versement des dommages et intérêts. Concernant, les organisations de producteurs (OP), lorsque le producteur a donné mandat à une OP reconnue dont il est membre pour négocier la commercialisation de ses produits sans qu'il y ait transfert de leur propriété, la conclusion par lui d'un contrat écrit avec un acheteur pour la vente des produits en cause est précédée de la conclusion et est subordonnée au respect des stipulations de l'accord-cadre écrit conclu avec cet acheteur par l'OP ou l'appellation d'origine protégée (AOP). Il appartient aux producteurs, aux OP ou aux AOP estimant que l'acheteur auprès duquel ils vendent leur production ne respecte pas ces dispositions, d'effectuer un signalement auprès de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Par ailleurs, d'autres voies existent pour obtenir satisfaction, notamment la saisine du médiateur des relations commerciales agricoles et, en cas d'échec lorsque le litige concerne la conclusion ou l'exécution d'un contrat ou d'un accord-cadre ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires, conclu entre un producteur agricole ou une OP et son premier acheteur, celle du comité de règlement des différends commerciaux agricoles (CRDCA), créé par la loi du 18 octobre 2021 dite « EGALIM 2 », préalablement à une action en justice. Le CRDCA a rendu pour la première fois, le 19 février 2024, une décision dans le secteur laitier. Ainsi qu'en témoignent ces deux décisions, le cadre législatif issu des lois EGALIM offre des solutions aux producteurs et à leurs OP afin de rééquilibrer les relations commerciales, les contrôles diligentés par la DGCCRF ayant par ailleurs été renforcés. Pour autant, des améliorations sont nécessaires et le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour répondre aux attentes fortes exprimées par les agriculteurs d'une plus grande protection de leur rémunération. Une mission gouvernementale a été confiée en ce sens aux députés Anne-Laure Babault et Alexis Izard en vue de renforcer le cadre issu des lois EGALIM.

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