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Hendrik Davi
Question N° 16661 au Ministère du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire


Question soumise le 2 avril 2024

M. Hendrik Davi interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la publication d'un bilan ainsi qu'une évaluation du plan France Relance « Aider la forêt à s'adapter au changement climatique pour mieux l'atténuer » volet « renouvellement forestier », comprenant notamment son impact sur la biodiversité. Ce plan de 150 millions d'euros, inscrit au sein du pilier « Ecologie » a pour objectif de « planter 45 000 hectares de forêts qui permettront de capter 150 000 tonnes de CO2 supplémentaires chaque année. Cette mesure permettra d'augmenter les surfaces plantées, de régénérer les forêts existantes et de reconstituer celles qui ont dépéri ». Or ni le site du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, ni celui du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, ni enfin le rapport final du Comité d'évaluation du plan France Relance publié en janvier 2024 ne fournissent d'informations sur la mise en œuvre de cette mesure. Le dossier consacré au plan de relance sur le site internet du ministère de l'agriculture ne comporte aucune information plus récente que le 19 février 2021. Aucun rapport ne semble avoir été produit par l'administration présentant les données consolidées qui permettraient d'évaluer l'efficacité de cette mesure par rapport aux objectifs chiffrés annoncés notamment de captage de CO2 ni ses incidences sur l'environnement. Seul un bilan provisoire synthétique a été présenté sous la forme d'un diaporama transmis aux seuls membres d'un comité spécialisé du Conseil supérieur de la forêt et du bois en avril 2022 et portant sur les projets retenus jusqu'au 31 décembre 2021. D'après ce document, le douglas, essence sensible aux canicules et aux sécheresses, couvre à lui seul 1/4 des surfaces financées, en remplacement de forêts existantes feuillues. Enfin, 25 % des plantations financées se situaient dans des zones Natura 2000, sans évaluation d'incidence préalable ni suivi des effets sur la biodiversité. Les organisations non gouvernementales (ONG) environnementales ont exprimé la demande, renouvelée à plusieurs reprises, de disposer d'un bilan complet et des informations relatives à l'environnement sur les surfaces et essences plantées, leur diversité, la part des surfaces renouvelées après coupe rase, les modalités de prise en compte des réglementations environnementales et les garanties concernant la compatibilité des opérations de renouvellement avec la conservation de la biodiversité comme l'évitement de la destruction d'habitats et individus d'espèces protégées, ou encore la sollicitation de l'avis préalable du gestionnaire d'un espace protégée. Compte tenu de l'inscription de cette mesure de « renouvellement des forêts » au sein du pilier « Ecologie » du plan de relance, ce bilan apparaît indispensable pour s'assurer que les actions financées n'ont pas eu d'effets collatéraux négatifs sur l'environnement, garantissant ainsi l'efficacité des soutiens financiers accordés. Par conséquent, M. le député demande à M. le ministre de diffuser un bilan complet de la mesure « Aider la forêt à s'adapter au changement climatique pour mieux l'atténuer » volet « renouvellement forestier » du plan France Relance, avec une évaluation détaillée des effets de sa mise en œuvre sur l'environnement et les espaces protégés, dont le réseau européen Natura 2000 pour lequel l'État est tenu de garantir que les activités autorisées sont compatibles avec la préservation ou l'amélioration de l'état de conservation des sites désignés. Enfin, il faut rappeler que seulement 14 % des forêts françaises sont des plantations. La régénération naturelle demeure la façon la plus écologique et la moins onéreuse pour renouveler le patrimoine forestier du pays. Cette régénération naturelle nécessite une gestion au plus près des territoires et donc le renforcement du service public de la forêt. Or depuis plus de 30 ans, les moyens de l'Office national des forêts (ONF) sont en chute libre. L'organisme a perdu presque la moitié de ses effectifs passant de 15 000 agents en 1985 à 8 000 aujourd'hui. La mission d'intérêt général de l'État (45,6 millions d'euros) ne correspond qu'à 6,6 % du budget de l'ONF (682 millions d'euros). Le manque d'effectifs et la perte du sens du métier conduisent à d'immenses souffrances au travail et à des suicides. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse émise le 21 mai 2024

La forêt a un rôle multifonctionnel pour la société et répond à des stratégies de long terme dont l'État est et restera le garant. Plus que jamais, la forêt est un élément clef des ambitions climatiques de la France et de lutte contre la perte de biodiversité. Sa capacité de stockage de carbone est essentielle pour répondre aux objectifs de neutralité carbone, tout comme sa capacité à produire du bois, une ressource durable participant à décarboner l'économie française ainsi qu'à fournir une énergie renouvelable. Or le puits de carbone forestier a diminué d'un tiers en une décennie. Cette diminution est le fait même des impacts du changement climatique. Il est donc important de réamorcer cette véritable « pompe à carbone » qu'est la forêt française, afin de reconstituer des nouveaux peuplements en capacité de résister au climat à venir et de participer au développement du bois dans tous ces usages, tout particulièrement les usages à longue durée de vie tel que les produits du secteur de la construction. Il s'agit d'en enjeu majeur qui doit conduire non pas à ralentir le renouvellement forestier mais au contraire à l'accélérer à court et moyen terme. C'est dans ce constat que s'est inscrite la politique prioritaire du Gouvernement « Planter un milliard d'arbres » annoncée par le Président de la République le 28 octobre 2022 lors de son intervention à l'attention des acteurs engagés dans la prévention et la lutte contre les incendies de forêt. Il s'agit d'un double objectif, planter un milliard d'arbres et renouveler 10 % de la forêt française en dix ans. Le plan de relance a constitué le premier pas dans cette direction avec le lancement de la mesure « renouvellement forestier » soutenant les propriétaires forestiers qui investissent pour adapter leurs forêts au changement climatique ou pour améliorer leur contribution à l'atténuation de celui-ci. Alors que l'objectif annoncé était la plantation de 45 000 hectares (ha) de forêt, le plan France Relance a permis la plantation de 58 millions d'arbres et le renouvellement de plus de 46 628 ha (principalement sur les régions Grand-Est, Bourgogne-Franche-Comté, Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes) pour un montant de crédits engagés de plus de 203,7 millions d'euros (M€). Un premier bilan partiel avait été réalisé en cours de procédure auprès des membres du comité spécialisé « Gestion durable des forêts » du conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB), au sein duquel siègent toutes les parties prenantes concernées, tant côté filière que côté organisations non gouvernementales. Comme le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire s'y était engagé, après les derniers engagements de dossiers qui ont eu lieu jusqu'en fin d'année 2023, un bilan complet et détaillé de la mesure en faveur du renouvellement forestier du plan France Relance, y compris s'agissant des aspects environnementaux (surfaces et essences plantées, essences indigènes ou non indigènes, essences feuillues ou résineuses, diversification, renouvellement par plantation en plein, notamment après coupes sanitaires, régénération naturelle, focus sur les zones Natura 2000, etc.) a été présenté, et a pu faire l'objet d'échanges fin mars 2024 avec les membres du comité spécialisé « Gestion durable des forêts » du CSFB. Il convient notamment de relever que les demandes d'aide déposées concernent pour plus de 60 % de la surface des peuplements sinistrés, sachant que dans la moitié des cas ce sinistre est dû à un insecte ravageur bien connu, le scolyte de l'épicéa. De ce fait les coupes sanitaires sont majoritaires, avec un renouvellement qui s'est traduit par des plantations en plein dans 89 % des cas. Les projets d'amélioration des peuplements pauvres représentent un peu moins d'un tiers des surfaces, ils se sont concentrés en Nouvelle-Aquitaine. L'ensemble de tous les projets déposés ont fait l'objet d'un diagnostic réalisé par un professionnel de la gestion forestière permettant d'assoir les conditions d'éligibilité et de proposer un projet de reboisement en cohérence avec la réglementation existante, et notamment les objectifs de gestion durable, et en tenant compte des effets du changement climatique. À la demande des acteurs, un rapport de ce dispositif, reprenant notamment ces éléments de bilan, sera réalisé ultérieurement et diffusé plus largement, mais ces chiffres ne peuvent être mis en publicité sans un certain nombre d'analyses et commentaires. À noter, par ailleurs, que le retour d'expérience de ce dispositif permet également de s'inscrire dans une dynamique d'amélioration continue des dispositifs suivants. Le guichet « renouvellement forestier » France 2030 a notamment renforcé les exigences en matière de diversification, de certification environnementale et de maintien d'éléments écologiques présentant un intérêt pour la biodiversité. Enfin, le futur dispositif en faveur du renouvellement forestier pérennisé dans le cadre de la planification écologique prendra le relais de France 2030 en 2024. Concernant l'office national des forêts (ONF), l'État a pris toute sa part dans la mise en œuvre de cette mesure de renouvellement forestier. Dans le cadre de cette mesure, le ministère de l'agriculture et de la souverainté alimentaire a ainsi alloué la somme de 60 M€ à l'ONF en sa qualité de gestionnaire des forêts domaniales, lequel a assuré le renouvellement de plus de 10 000 ha de ces forêts en additionnalité par rapport aux surfaces forestières qu'il régénère dans le cadre de la gestion multifonctionnelle de ces espaces. À noter que ces opérations sont constituées majoritairement par de l'enrichissement, des plantations par placeaux, et sur moins d'un quart de la surface traitée par des travaux de plantation en plein, justifiés suite à la réalisation de coupes sanitaires. Pour mener à bien cette mesure d'envergure, l'établissement a pu compter, en 2023 et en 2024, sur une neutralisation de son schéma d'emplois tel qu'il est associé au contrat qu'il a signé avec l'État, permettant ainsi une stabilisation de ses effectifs après des années de baisse continue et ainsi de lui donner les moyens d'assurer l'ensemble des missions qui lui sont dévolues. Les efforts financiers de l'État pour soutenir l'ONF dans des renouvellement additionnels de surfaces se poursuivent par ailleurs avec la signature en 2023 d'une convention de 40 M€ sur crédits France 2030 pour la métropole et début 2024 d'une convention de 5 M€ au bénéfice des outre-mer. Enfin, récemment une première convention sur les crédits planification écologique d'un montant de 70 M€ a été signée lors du salon international de l'agriculture 2024. Une diversité d'itinéraires techniques, plantation quand c'est nécessaire, mais également enrichissement par placeaux ou régénération naturelle accompagnée, sont bien prévus pour s'adapter aux différentes situations requises et assurer l'exemplarité du renouvellement forestier conduit dans les forêts domaniales grâce à l'expertise des agents de l'ONF.

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