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Hubert Wulfranc
Question N° 7081 au Secrétariat d'état à l’écologie


Question soumise le 11 avril 2023

M. Hubert Wulfranc alerte Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur les conséquences délétères de l'instauration d'une consigne pour le recyclage des bouteilles plastiques évoquée par Mme la secrétaire d'État le 30 janvier 2023. Contrairement au système, autrefois en vigueur, de consigne des bouteilles en verre qui permettait le réemploi direct des bouteilles après lavage, il s'agirait ici de mettre en place un système de consignation dont le but est le recyclage du produit et non son réemploi. Une consigne d'une dizaine de centimes serait prélevée à chaque achat de bouteille en plastique, laquelle pourrait être restituée au consommateur seulement si celle-ci serait rapportée dans un déconsigneur. Contrairement au réemploi, le recyclage ne permet pas d'utiliser la matière à l'infini, les pertes en ligne sont importantes et la consommation de nouvelles ressources à chaque cycle reste inévitable. Les emballages plastiques sont rarement recyclés plus d'une fois. À l'inverse, les bouteilles en verre consignées peuvent être réemployées entre 20 et 50 fois, or celles-ci sont exclues de la réflexion sur la consignation des bouteilles. Le projet de mise en œuvre d'une consignation pour les bouteilles plastique est soutenu par le « collectif boisson » qui rassemble les grandes entreprises privées de distribution de boissons, notamment internationales. Actuellement, les professionnels de la boisson paient le « point vert », une taxe de 1 centime d'euro par bouteille destinée à financer le recyclage. Son produit avoisine les 160 millions d'euros chaque année. La mise en œuvre de la consignation des bouteilles de plastiques se substituerait au paiement de cette taxe et pourrait générer des profits supplémentaires pour les industriels. Ainsi, si 10 % des acheteurs ne rendaient pas leur bouteille, 240 millions d'euros par an ne seraient pas remboursés avec un montant de consigne fixée à 15 centimes d'euro. Les industriels du collectif boisson se positionnent déjà pour prendre la tête de l'éco-organisme qui gérerait cette manne financière. De plus, un tel dispositif nécessiterait, selon le rapport d'expertise de Jacques Verdier, missionné par le ministère en charge de l'écologie, de déployer 110 000 points de reprise avec 27 000 machines de déconsignation sur l'ensemble du territoire, pour un coût avoisinant le milliard d'euros. La consignation limitée aux bouteilles en plastique ne permettrait pas de réduire les frais de collecte et de traitement des déchets gérés par le service public dans la mesure où les bacs ou sacs de déchets recyclables devront toujours être collectés pour les autres emballages et papiers, tandis que les centres de tri seront toujours tenus de séparer les différentes matières valorisables. De plus, Les recettes tirées jusqu'à présent de la vente des bouteilles en plastique ne seraient pas compensées pour les collectivités organisant la collecte et la valorisation des déchets. Or les bouteilles en plastique constituent l'un des emballages les plus rémunérateurs alors que les barquettes et autres plastiques ne le sont pas. Les collectivités locales perdraient dans leur ensemble une source de rémunération du service de collecte et de traitement des déchets, qu'elles ne pourraient compenser qu'en augmentant la taxe ou la redevance d'enlèvement des ordures ménagères payée par les habitants. Contrairement aux autres emballages en plastique, dont nombre d'entre eux sont encore orphelins de solutions de recyclage, les bouteilles en plastique se recyclent aisément ce qui leur accorde une valeur marchande importante. La consignation des bouteilles en plastique extrairait du service public les produits rémunérateurs alors que ceux qui lui coûteraient seraient laissés à sa charge. En d'autres termes, l'opération consisterait à privatiser les profits et à socialiser les pertes. Selon l'association Amorce, qui regroupe des collectivités territoriales, la France produit chaque année 1,1 million de tonnes de déchets plastique ménagers dont 360 000 tonnes de bouteilles. 200 000 tonnes, soit 56 % des bouteilles, sont déjà recyclées. Il s'agit du meilleur taux de collecte sélective parmi tous les objets plastiques. La loi AGEC a fixé à 77 % l'objectif de recyclage des bouteilles en plastique d'ici 2025, puis 90 % à l'horizon 2030. Selon une note du Cercle national recyclage de juillet 2020, les collectivités atteignaient déjà une performance de 73 % sur la collecte et le recyclage des bouteilles générées par la consommation des foyers. Cela démontre l'efficacité du tri et du recyclage tel qu'il est actuellement pratiqué en France. L'objectif de 77 %, puis de 90 %, paraît donc tout à fait atteignable dans le cadre du système de collecte public géré par les collectivités locales. À l'inverse, la même note indique que la collecte hors foyer, qui ne concerne pas le service géré par les collectivités, atteint une performance très faible plombant le résultat d'ensemble. Il semblerait donc plus judicieux de focaliser les efforts sur ces gisements générés et jetés hors des foyers, aujourd'hui non récupérés. Dans le même temps, 700 000 tonnes d'emballages restent orphelines de solution de traitement avec un taux de recyclage quasi anecdotique de l'ordre de 4 %. Par ailleurs, la mise en place d'un réseau de collecte dédié aux bouteilles en plastique rémunéré, en parallèle du système de collecte des collectivités locales qui nécessite un effort gratuit, aurait pour conséquence de dégrader l'image du service public du recyclage au profit des industriels de l'embouteillage. Le système de consignation des bouteilles plastiques ajouterait un flux de véhicules spécifiques dédié à la collecte de ces déchets ce qui impacterait négativement le bilan carbone du système de traitement des déchets ménagers. Aussi, M. le député demande à Mme la secrétaire d'État de reconsidérer cette fausse bonne idée qui ne manquerait pas d'affecter le fonctionnement et l'équilibre financier général de service public de collecte et de traitement des déchets ménagers. À l'inverse, il lui demande de bien vouloir lui préciser si elle entend fixer des contraintes normatives et prendre des mesures financières incitatives pour augmenter l'usage des contenants en verre durablement réemployables et par ailleurs, recyclables à l'infini.

Réponse émise le 4 juillet 2023

L'amélioration de la collecte et du recyclage de tous les déchets plastiques est une priorité du gouvernement. S'agissant des emballages plastiques, les performances actuelles restent insatisfaisantes, avec un taux de collecte pour recyclage de moins de 25% pour les déchets d'emballages plastiques, et de 60% pour les bouteilles plastiques. En outre, plusieurs collectivités ont des performances de collecte de moins de la moitié de ces moyennes nationales. Or, les objectifs fixés par la loi et le cadre européen sont d'atteindre 50% de recyclage des déchets d'emballages plastiques en 2025, et 90% de recyclage des bouteilles plastiques en 2029. Pour progresser sur la collecte des déchets d'emballages plastiques, dont les bouteilles, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a engagé le 30 janvier 2023 une concertation avec l'ensemble des parties prenantes, et notamment avec les collectivités. Cette concertation doit permettre de partager une compréhension commune des leviers qui permettraient de faire progresser la collecte, dont la mise en place éventuelle d'un dispositif de consigne. Le développement des solutions de réemploi des emballages fait également partie des questions approfondies dans le cadre de cette concertation, y compris la consigne pour réemploi des emballages.  Le ministère n'a pas de parti pris et toutes les options sont discutées pour améliorer la performance de collecte des déchets d'emballages, afin de réduire les dépôts sauvages et de développer les filières de réemploi et de recyclage.

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