Intervention de Alain Vidalies

Réunion du jeudi 11 mai 2023 à 9h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Alain Vidalies, ancien secrétaire d'État chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche :

Sur le fond, toutes les décisions prises en interministériel ont été respectées. Sur la forme, il y a eu quelques assouplissements à la règle commune. Dans une majorité, il n'est pas normal que certains s'exonèrent des décisions collectives qui ont été prises. Les amendements Belot ou Caresche ne représentaient pas une pratique de grande qualité mais ils n'ont pas eu de conséquence. Je le répète : il n'y a jamais eu de remise en cause des décisions prises dans les réunions interministérielles auxquelles j'ai participées. D'un côté, le ministère de l'Intérieur et mon ministère soutenions la question des taxis, mais aussi la question sociale face au ministère de l'Économie, dont le point de vue était différent sur ce sujet.

Ensuite, je pense que les journalistes ont effectué une erreur d'appréciation sur la portée de l'arrêté du 2 février 2016. Celui-ci a été signé par des hauts fonctionnaires du ministère des Transports, du ministère de l'Intérieur et de la direction de la Concurrence et de la Consommation au ministère de l'Économie. J'aurais donc accepté le supposé « deal » avec Uber alors même que je n'étais pas en meilleurs termes avec la société ?

Ensuite, si ce « deal » existait avec les conséquences que vous craignez, s'est-il manifesté dans les chiffres ? Selon certains, en réduisant de 250 à sept heures la durée de formation, on aurait facilité l'accès des VTC. Si tel avait été le cas, le nombre de licences aurait connu une croissance exponentielle. Or le résultat a été exactement l'inverse. Au préalable, le marché de la formation fonctionnait au noir, sans contrôle. L'arrêté a changé radicalement le système, en faisant en sorte que le juge de paix ne soit plus la formation mais l'examen. Comment peut-on nous reprocher une forme de laxisme alors que nous avons remplacé une formation qui était suspecte pour tout le monde par un véritable examen ?

J'en veux pour preuve la réaction d'Uber, qui a été développée par Thibaud Simphal, le directeur général d'Uber France au mois de juin 2016, dans la publication L'Usine digitale. Celui-ci y indiquait, dans son interview, que « la préoccupation des gens qui nous contactent aujourd'hui, ce n'est malheureusement pas " comment je fais pour avoir une assurance accident du travail ", mais tout simplement " comment je fais pour pouvoir travailler et devenir chauffeur ? ". Aujourd'hui, des centaines d'aspirants chauffeurs sont sur listes d'attente, en raison de l'examen qui a été mis en place. Pendant trois mois, de janvier à mars, ils ont attendu, révisé. Et en avril, l'examen est enfin arrivé et le taux de réussite fut élevé (85 %). Les taxis ont râlé. En mai, pour le deuxième examen, l'administration a revu les questions, durci l'épreuve d'anglais et mis du Camus dans l'épreuve de français. Le taux de réussite est tombé à 25 %, et la liste d'attente s'allonge (…). Soyons clairs, j'adore La Peste d'Albert Camus, et tant mieux si beaucoup de gens le lisent. Mais est-ce vraiment une compétence indispensable pour conduire ? »

Il n'est donc pas possible de continuer à penser que l'arrêté faisait preuve de laxisme.

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