Intervention de Salwa Toko

Réunion du mercredi 17 mai 2023 à 16h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Salwa Toko, ancienne présidente de Becomtech, ancienne présidente du Conseil national du numérique et auteure du rapport Travailler à l'ère des plateformes :

Je m'exprimerai en tant qu'ancienne présidente du Conseil national du numérique car nous avons travaillé pendant plus d'un an à l'élaboration d'un rapport en auto-saisine sur les travailleurs des plateformes.

Ce rapport visait à réaliser un état des lieux concernant les travailleurs des plateformes et l'ubérisation de l'économie, puis à proposer des recommandations permettant aux pouvoirs publics de rétablir l'ordre dans un domaine qui peut parfois ressembler au Far West.

Nous n'avons pas tenu à travailler sur la question cruciale du statut de ces travailleurs. Le CNU n'est pas une organisation sociale et nous avons donc estimé ne pas disposer des compétences pour aborder ce sujet. Nous avons préféré travailler sur la question de la nécessité d'un dialogue social entre les différents acteurs, les plateformes et leurs travailleurs mais aussi les pouvoirs publics.

Par ailleurs, j'ai cru comprendre qu'un observatoire avait été créé mais je n'ai pas l'impression que ce soit le meilleur des formats qui ait été choisi. J'ai aussi cru entendre dans les actualités qu'un premier vote des travailleurs des plateformes avait eu lieu concernant leurs représentants pour ce fameux dialogue, mais je ne suis pas sûre que les résultats soient déjà disponibles. Je noterai cependant que sur 120 000 travailleurs des plateformes, seuls 3 000 ont pu voter. C'est un point qu'il faudra creuser car travailler sur les plateformes, c'est aussi travailler sur les personnes qui ont choisi cette activité. Pour beaucoup d'entre eux, le travail salarié classique a été compliqué.

S'il fallait donner une définition de l'ubérisation de l'économie, je me demande s'il ne faudrait pas signaler que c'est la première fois dans notre histoire économique que les compétences sanctionnées par un diplôme ne sont pas requises pour exercer un métier. Pourtant, certains de ces métiers exigeaient auparavant un diplôme ou au moins des compétences reconnues par un diplôme, par une certification ou par les professionnels du secteur.

Cela nous amène à nous poser d'autres questions sur ces nouvelles formes de travail et sur leurs évolutions. Nous pouvons notamment nous demander si la situation peut encore empirer. Lorsque vous posez la question des secteurs qui sont ubérisés, je me demande s'il ne faudrait pas plutôt s'interroger sur ceux qui ne le sont pas. Comment des activités que nous considérions comme protégées ont-elles pu se trouver ubérisées ? Je pense notamment à l'éducation où tout un pan de cette activité fait appel à des plateformes. Face à ces évolutions, il faut s'interroger sur les moyens de se prémunir des errements qu'induit l'ubérisation de l'économie.

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