Intervention de Esther Duflo

Réunion du mercredi 21 juin 2023 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Esther Duflo, professeure au Massachusetts Institute of Technology et au Collège de France, prix Nobel d'économie de 2019 :

Je vous remercie pour cette question. L'essentiel consiste à trouver un mécanisme auquel nous pouvons nous contraindre. Les accords de Paris avaient promis de lever 100 milliards destinés aux pays pauvres, qui n'ont jamais été véritablement atteints. En outre, ils ont surtout été dépensés sous forme de prêts, pour l'atténuation du changement climatique, au bénéfice des pays riches. Nous sommes donc très loin d'avoir tenu nos promesses, ce qui prouve que nous devons fixer un nouvel engagement.

Il sera difficile de trouver un mécanisme qui finance tout, sauf si celui-ci devait un être un impôt international sur les très grosses fortunes. S'il était mis en œuvre, il permettrait de lever les 500 milliards dont je parlais précédemment, voire peut-être les 2 000 milliards qu'évoquent les Nations Unies. Cependant, la possibilité empirique de cette taxe sur les très grosses fortunes apparaît peu probable.

Une autre possibilité que j'explore en ce moment a trait à l'accord au sein de l'OCDE sur une taxe minimum sur les bénéfices des grandes multinationales à un taux de 15 %, soit un seuil très bas par rapport aux 25 % envisagés initialement. Si cet impôt passait à 18 %, cela permettrait de lever 300 milliards supplémentaires pour les pays pauvres. Si l'on passait de 15 à 20 %, on atteindrait 400 milliards. En résumé, à chaque pourcent supplémentaire, on gagne environ 100 milliards. Une telle taxe est progressive par nature, puisqu'elle ne s'applique qu'aux très grandes entreprises internationales. Elle pourrait aussi être teintée de taxe carbone si elle était liée à un véritable bilan carbone des entreprises. En effet, il n'existe pas aujourd'hui de comptabilisation excellente du carbone mais nous y travaillons. En résumé, en partant d'un mécanisme de coopération déjà en place, on pourrait relativement facilement arriver à lever une partie non négligeable des fonds nécessaires.

Il existe par ailleurs d'autres mécanismes, qui seront explorés au sommet, comme la taxe sur le fret international maritime, qui n'est pas taxé aujourd'hui. Les estimations font à cet égard état de 100 milliards potentiels.

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